10 Propositions pour l’Europe : 6) Lancer un espace européen des énergies renouvelables sous la forme d’un « Schengen des renouvelables »

L’Europe des énergies renouvelables n’est pas incompatible avec le nucléaire et elle est porteuse d’espoirs. Comme en 1950, re-lançons l’Europe par l’énergie. Actuellement les politiques sont nationales, la R & D aussi, comme les tarifs de rachat. Cet espace européen des renouvelables préserverait et développerait l’avance technologique européenne. Il pourrait comprendre un fonds pour l’innovation et le déploiement des renouvelables (alimenté par la mutualisation des ressources issues des ventes aux enchères des quotas de CO2), un soutien aux « projets communs » entre Etats membres prévus par la directive renouvelables de 2009 et un régime d’aide et des tarifs communs de rachat de l’électricité.


Malgré un marché interconnecté à dimension de plus en plus continentale et des objectifs communs à 2020, l’énergie divise l’Europe. Politiquement et socialement, elle traduit des aspirations, des vulnérabilités et des situations géographiques différentes. Les Allemands rêvent de sources d’énergie décentralisées, à l’image de leur système fédéral. Polonais, Tchèques, et Baltes veulent assurer leur indépendance, accélérer leur développement et préserver leurs emplois (charbon…). Les Britanniques, après s’en être remis au marché, se dotent à présent des instruments d’une politique innovante (prix plancher du carbone, rémunération des capacités de réserve, contrats de long terme, budget carbone…). Les politiques énergétiques demeurent nationales, sinon unilatérales. L’Allemagne contourne la Pologne et les États baltes pour son approvisionnement de long terme en gaz russe (North Stream). Elle décide en trois jours d’un virage à 180° de sa politique nucléaire. La France de son côté a surpris en interdisant l’exploitation des gaz non conventionnels, sans se soucier de la dimension continentale du sujet. Dans le domaine des renouvelables, on note que seuls deux ou trois États membres envisagent de recourir au mécanisme de coopération prévu par la directive de 2008.

L’UE doit poursuivre un bouquet énergétique équilibré. Une proposition forte en faveur des énergies renouvelables consisterait à lancer un « Schengen » des renouvelables, si possible au niveau communautaire, et à défaut par une coopération renforcée qui aurait vocation à s’élargir peu à peu.

Pour accélérer le développement des énergies renouvelables en Europe, les États membres doivent fédérer leurs efforts. Ce « Schengen des renouvelables » s’appuierait sur:

  • une vision commune exprimée par une déclaration politique.
  • une identité juridique fondée sur un traité multilatéral.
  • la création d’un fonds pour l’innovation et le déploiement des renouvelables, alimenté par la mutualisation des ressources issues des ventes aux enchères des quotas de CO2.
  • un soutien aux « projets communs » entre États membres prévus par la directive renouvelables de 2009 (art. 7).
  • un régime d’aide commun (art. 11).
  • des tarifs communs de rachat de l’électricité d’origine renouvelable, permettant une meilleure allocation des investissements.
  • une démarche industrielle, qui pourrait prendre la forme d’une « entreprise commune », par exemple dans le domaine de la logistique de l’éolien off-shore (barges, développement des infrastructures portuaires…).
  • des mesures de formation professionnelle. Soutien à des cursus pour la reconversion des personnels issus du secteur énergétique fossile, création d’un Institut européen des renouvelables.
  • un effort financement de la R&D : engagement à apporter une contribution financière publique et privée significative et aux initiatives industrielles européennes prévues dans ce cadre, par exemple :

Outre qu’il complète de façon industrielle le paquet-énergie-climat, ce projet présenterait l’avantage de préserver le leadership industriel européen dans le domaine des énergies sobres en carbone.

On pourrait imaginer que l’ensemble des technologies reçoivent des financements publics-privés adéquats: éolien, solaire, bio-énergies, CSC, nucléaire, réseaux intelligents. Une priorité pour le budget européen 2014-2020?

La France, de son côté, doit maintenir l’atout de sa maîtrise du nucléaire sûr qui est un domaine de leadership industriel incontesté.

L’éolien off-shore est encore et doit rester une industrie à forte valeur ajoutée européenne.

Une technologie essentielle pour l’avenir mérite toutes nos attentions: le stockage de l’électricité. Les compétences européennes doivent être développées, au sein d’une future initiative industrielle européenne. Les atouts stratégiques européens doivent pouvoir être protégés des investissements hostiles (« clause Gazprom »).

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