Trois idées simples pour une vraie Europe diplomatique

L’Eurobaromètre, depuis des années, nous indique que les citoyens européens attendent de l’Europe moins de normes mais plus de puissance: qu’elle soit forte et qu’elle fasse entendre les intérêts et les valeurs de notre continent dans le monde multipolaire.

Or, en matière d’action extérieure, l’UE a déjà deux grands atouts connus, à savoir son poids commercial (premier marché du monde, qui justifie le respect dont jouit la DG Commerce dans les négociations commerciales) et celui de son aide au développement (premier bailleur de fonds, qui justifie l’attrait irrésistible des ministres des pays en développement pour Bruxelles).

Mais comment se servir de ces atouts? Comment devenir une vraie force diplomatique? Ces trois prochaines semaines nous développerons trois pistes d’amélioration non prévues par le traité de Lisbonne mais qui sont compatibles avec lui.

Le traité de Lisbonne devait, en principe, avoir un impact important sur la représentation extérieure de l’UE. D’une part, la nomination du haut représentant (article 18 nouveau) permet désormais de concentrer en une personne des pouvoirs autrefois éclatés entre le Conseil et la Commission. Lady Ashton rassemble ainsi la parole politique autrefois portée par Javier Solana et le porte-monnaie des programmes d’aide au développement de Benita Ferrero-Waldner. D’autre part, la constitution d’un corps diplomatique unifié, le « service européen pour l’action extérieure » (SEAE, article 27-3), qui est une institution nouvelle distincte de la Commission, doit permettre de faire travailler ensemble l’ancienne DG Relex, le secrétariat du Conseil et des diplomates nationaux.

En pratique, les progrès sont lents. La mise en place du SEAE a donné lieu à une bataille pour les postes entre la Commission et les États membres qui a ralenti sa constitution. Lady Ashton, novice en diplomatie, continue d’hésiter sur des sujets simples. La place du SEAE par rapport à la Commission n’est pas claire et, d’après les fonctionnaires de ce service que j’ai interrogés cet été en juillet à Bruxelles, une rivalité SEAE-Commission est même apparue. Ils sont déjà las de ce fonctionnement, fatigués de Mme Ashton, et m’ont semblé au total un peu désabusés. La visibilité générale de l’UE à l’étranger, quant à elle, n’a pas augmenté de façon significative. L’UE reste, pour Delhi ou Tokyo, une puissance commerciale sans poids politique; et Barrack Obama, en mai 2010, annulait purement et simplement sa participation au sommet annuel UE-États-Unis, dans l’attente, dit-il, que l’UE clarifie la répartition de ses compétences.

Certes, s’appuyant sur les promesses du traité de Lisbonne, certains petits États membres ont commencé à fermer des ambassades nationales à l’étranger dans l’espoir que le SEAE leur permette de faire des économies. Encore faut-il que la représentation européenne soit à la hauteur.

Pierre Vive

Le Figaro a dit « L’aide à la Grèce coûtera 15 milliards d’euros à la France », c’est FAUX!

L'Atelier Europe inaugure une nouvelle rubrique, "Contrevérités", destinée à rétablir la vérité sur l'actualité européenne, qu'il s'agisse de corriger des erreurs factuelles, ou de dénoncer des mensonges ou des contrevérités trop souvent colportées par des décideurs politiques, pamphlétaires, journalistes…

Une erreur classique que le "titreur" de cet article du Figaro commet ici (mais pas l'auteur de l'article, qui présente une version correcte des faits), comme beaucoup l'ont fait depuis le début de la crise financière, notamment dans le cas des prêts accordés aux banques. Non, l'aide ne "coûtera" pas 15 milliards d'euro, puisque cette aide sera remboursée! Certes, l'endettement français va s'accroître à court terme de ce montant, mais cette somme va progressivement être remboursée. La France devrait même y gagner, puisqu'elle prête à un taux supérieur au coût de son endettement. A moins qu'elle y perde si sa note est dégradée en conséquence (scénario peu probable: ce montant représente moins de 1% de la dette actuelle). Mais dans les deux cas (gain ou perte), la quantification est un exercice délicat, contrairement à ce que ce titre laisse penser."

La montée des populismes en Europe menace-t-elle le projet d’une union politique?

L’Atelier Europe poursuit son partenariat avec le Master Affaires européennes de l’Institut d’études politiques, en commanditaire de projets collectifs, réalisés par les étudiants de ScPo. Cette année, le thème « La montée des populismes en Europe menace-t-elle le projet d’une union politique? » a donné lieu à un documentaire constitué d’interviews de chercheurs et d’universitaires, à une note d’analyse, ainsi qu’une projection à Sciences Po suivie d’un débat avec Jacques Barrot.
Nous laissons la parole à Laura Fakra, Athéna Fooladpour, Christoph Schmiedel et Giovanni Scoazec, les quatre étudiants qui ont réalisé ce projet:

La vague populiste touche l’ensemble de l’Europe: en Belgique, aux Pays-Bas, au Danemark, en Suède, en Autriche, en République Tchèque ou encore en Suisse, les partis dits populistes ont le vent en poupe. Au-delà de la vision d’un mouvement raciste et xénophobe qui gangrène une Union européenne encore si fragile, ce cours documentaire cherche, à travers les réflexions de Jacques Sapir, Yves Mény, Dominique Reynié et Yves Surel, à comprendre les raisons du phénomène populiste. Pour cela, les experts se penchent dans un premier temps sur la définition du terme et sur son instrumentalisation par des partis politiques qui ne doivent pas être cantonnés à l’extrême-droite, puis ils s’intéressent aux raisons d’une montée populiste en Europe, aux risques qu’elle comprend et aux remèdes qui peuvent éventuellement émerger dans les circonstances actuelles. Parole aux spécialistes pour un aperçu juste et sans concession d’un débat essentiel dans l’avenir de l’UE.

 

La montée des populismes en Europe menace-t-elle le projet d’une union politique? from Atelier Europe on Vimeo.

Télcharger la note d’analyse.
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Budget européen : mais que veulent les Etats-membres ?

La Commission européenne a dévoilé cette semaine son projet de budget, pour l’Union européenne, pour la période 2014-2020. Ce projet comprend notamment une taxe sur les transactions financières et une remise à plat du « chèque britannique », un mécanisme qui assure au Royaume-Uni une moindre contribution nette au budget de l’UE.

C’est un budget d’une certaine ambition, face auquel plusieurs Etats membres ont fait semblant de s’offusquer, en avançant deux arguments d’apparence imparables : comment les institutions européennes osent-elles demander plus alors qu’elles prêchent la rigueur pour les Etats-membres ? Comment un Etat (en l’occurrence le Royaume-Uni) peut-il accepter de verser sensiblement plus au budget de l’UE qu’il ne reçoit de subventions (agricoles, régionales, de R&D…) ?

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Is there anybody out there?

How the desertion by national politicians of the EU is feeding the citizens’ feeling of a European political vacuum.

There is something wonderful about European politics. First, it doesn’t really exist in itself since most of the political power remains at the national level, but still the first target is always « Brussels! ». Second, the more perilous the political and economic outcome of the crisis is likely to be, the more urgent a radical solution becomes, and the more the national political classes seem to be ignorant if not indifferent to European issues.

It is amazing to see how the EU has evolved and deepened during the last decades. But, at the same time, national politicians have still followed their provincial paths towards power without a glance towards the cold bureaucratic world of Europe. The so-called gap between the EU and its citizens is in fact a gap between national politicians, who strongly hold the power in their hands,   and where a significant part of our democratic power is exercised, e.g. Brussels. Such politicians reflect a true and complete inability to understand the EU, which makes their natural recipients, the electors, feeling pretty uncomfortable when it comes to judging how the EU is managed. Who could blame them?

Actually, the strong rise of populist speeches if not ideas (the two are probably not the same since populism is more about reaction than action) in Europe is clearly fed by this fundamental inability of the political elite to understand the EU. It gives a feeling of big issues being out of the control of elected governments. That impacts strongly on the credibility of what moderate leaders could express. It also becomes easy for populist divas (there is an intriguing proportionality between lack of political maturity and the size of the egos) to point to the inaccuracy of decisions when there is indeed a lack of coordination within the EU for reaching consistent and efficient policies.  Hubris, or possibly shyness, prevents leaders from talking about the reality: for large-scale issues such as the economy, foreign policy and defence, none of the Member States have any longer the means, if not the will, to act alone.

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