2014: se replier n’est pas voter?

2013 aura été une année pour rien, ou presque. Comme nous le craignions, les élections allemandes ont gelé largement toutes velléités d’initiative ambitieuse. La France a obtenu un rabe de temps de la part de la Commission s’agissant de ses finances publiques, sans doute selon le principe éculé du too big to fail, mais comme toujours le pays n’en profite pas pour réformer en profondeur son économie. Ce sera, à n’en pas douter, l’éternelle antienne du temps perdu, qui lui se monétisera bien un jour.

DSC_00622014 s’annonce à la fois plus encourageante mais aussi plus incertaine. La ferveur pro UE à Kiev nous encourage, autant qu’elle nous oblige, dans notre chemin vers l’unité politique. L’Allemagne semble gouvernée par une équipe plus pro européenne, sans extravagance excessive bien entendu, et la perspective d’un nouveau leadership européen, si ce terme est approprié s’agissant de Jose Manuel Barroso, ne peut que ravir les nombreux contempteurs d’une décennie bien difficile pour nos convictions. Les Verhofstadt, Juncker et autres Sikorski sont en lice pour imprimer une nouvelle ambition mais l’histoire récente incite à la prudence quant au résultat de ce meccano infernal avec cette année, en sus des 28 États et du Parlement, l’intrusion, bienvenue mais dans un cadre obscur, des partis politiques européens qui devront proposer un candidat pour la présidence de la Commission. étant donnée la rédaction peu claire des Traités en la matière, l’Europe va sans doute nous réserver de belles surprises que nous habillerons de belles envolées sur le « compromis européen » qui ressemble pourtant à s’y méprendre à un foutoir lamentable.

Surtout, le grand enjeu de 2014 sera bien évidemment les élections européennes. Beaucoup a déjà été dit sur le sujet, notamment sur la probabilité d’une poussée populiste, mais force est de constater que les partis politiques, notamment en France, n’ont pas encore pris la mesure du risque et ils reproduisent les mêmes erreurs du passé: choisir des candidats en se fondant sur les rapports de force interne, sans souci de candidats crédibles, compétents et convaincus. Les électeurs se laisseront-ils vraiment grugés? La perspective d’un Parlement composé d’un quart, voire d’un tiers, d’élus qui souhaitent la destruction du système européen, voilà qui annonce des lendemains difficiles du fait de l’importance du Parlement et de la nature technique des sujets votés, laquelle exige un sens du compromis et de la responsabilité que les aboyeurs publics méprisent profondément.

Un autre aspect majeur de 2014 sera la tenue de referenda sur l’indépendance en Écosse et en Catalogne. Le repli, qu’il soit nationaliste ou régional, présente les mêmes dangers et l’Europe qui se construit sur le principe du rassemblement, non pas contre mais au profit des différentes strates identitaires qui nous structurent en tant qu’Hommes et peuples, ne peut que redouter cette atomisation. Cela n’annonce rien de bon sur notre capacité à construire une organisation politique pérenne et harmonieuse. De fait, le particularisme excessif n’exprime en rien la culture, il n’est que le produit d’une recherche existentielle vaine, celle de se déterminer par opposition faute d’être, soi. Et porte en germe la violence car il conduit à une impasse qui nourrit le ressentiment.

Par ces deux aspects, 2014 pose une question fondamentale, celle de l’état de notre démocratie européenne et plus précisément de notre système de représentation. La défiance croissante vis-à-vis de ceux qui nous représentent, les individus comme les institutions, renforce le délitement qui rend difficile toute construction d’avenir, comme l’Union. C’est contre cela que nous devons nous battre et il n’appartient qu’à nous, inlassablement, d’exprimer un discours de confiance et de démontrer que si la politique peut et doit changer, cela ne doit pas se faire par le bas, en raison d’une nostalgie vaine, et que ce que promettent les anti UE, c’est le discours de l’impuissance, celle qui nous mènera à la soumission.

Une année difficile mais passionnante, en somme, et vous pouvez faire confiance à l’Atelier pour porter haut l’engagement européen! Il est très difficile de surmonter l’inertie du système mais la recherche de perspectives positives est bien réelle chez nos concitoyens et le succès de nouvelles formes de participation au débat public nous encourage dans notre démarche. Nous y participerons activement, d’une forme ou d’une autre.

Dans l’attente de vous retrouver dans le cadre de nos activités, je vous souhaite, au nom de toute l’équipe de l’Atelier, une belle et lumineuse année 2014!

Jérôme Cloarec
Président de l’Atelier Europe