Que peut faire l’Europe pour moi ?

par Clara Petitfils

COMPTE RENDU. L’Atelier Europe présente le compte-rendu de la Consultation Citoyenne que nous avons organisée et animée à l’invitation de Christine Hennion, députée des Hauts-de-Seine, le 2 octobre 2018 à Courbevoie. La thématique abordée était « Que peut faire l’Europe pour moi ? ».  Les échanges se sont articulés autour de trois associations :

1. France Terre d’Asile, représentée par M. Pierre Henry, Directeur Général ; 2. HOP – Halte à l’Obsolescence Programmée, représentée par M. Samuel Sauvage, Président ; 3. UFC-Que Choisir représentée par Mme Karine de Crescenzo, Responsable des relations institutionnelles.

Trois élus étaient également présents :

1. Mme Christine Hennion, Députée de la troisième circonscription des Hauts-de-Seine ; 2. Mme Marie-Pierre Limoge, première adjointe au Maire de Courbevoie ; 3. M. Jean Spiri, Adjoint au Maire de Courbevoie.

L’événement était organisé par le think tank Atelier Europe. Environ soixante-dix personnes étaient présentes.

Aymeric Bourdin, Président de l’Atelier Europe

BILAN DU PREMIER TEMPS D’ECHANGE :

Les huit groupes formés ont discuté pendant quinze minutes de la question « Que fait l’Europe pour moi ? ». À l’issu de ce temps d’échange chaque table a présenté, sous diverses formes (liste, petit discours, etc), ses conclusions. Voici la restitution de ces discussions.

À noter que parfois certains points peuvent se recouper. Ces possibles répétitions ont été volontairement conservées afin de souligner l’importance de certains éléments pour les citoyens.


GROUPE 1

Le premier groupe a opté pour un discours plutôt succinct, via lequel la porte-parole désignée a expliqué que les échanges avaient surtout révélé de nombreux points positifs. La table s’était accordée à dire que l’Europe et l’UE en particulier apportait beaucoup au quotidien, tel qu’une monnaie unique ou une liberté de circulation.

Cependant, la porte-parole a souligné que beaucoup de craintes avaient ensuite émané du débat : comprendre ce que l’Europe nous apporte au quotidien amènerait inéluctablement à soulever des craintes. Pour cela une recommandation a été formulée : afin d’apaiser ces craintes et réticences il conviendrait d’expliquer au citoyen, de rendre certains débats européens moins obscurs. Cela passerait par une simplification.

GROUPE 2

Le deuxième groupe a opté pour une liste de tous les avantages relatifs à la citoyenneté européenne.

Voici la liste exhaustive des points énoncés : Le programme Erasmus pour les étudiants de second cycle ; La possibilité de circuler librement au sein de l’espace Schengen sans visa ; Liée au point précédent, la détention du passeport européen ; La monnaie unique pour 19 Etats membres ; La possibilité pour un citoyen d’un autre Etat membre de l’UE résidant dans un autre état que son Etat d’origine, de participer aux élections municipales, ainsi qu’aux élections européennes ; L’homologation des diplômes universitaires, via le système commun dit des ECTS (European Credit Transfer Scale) ; La carte européenne de sécurité sociale ; L’harmonisation des coûts de communications téléphoniques (free roaming) ; Les différentes normes des objets entourant notre quotidien et qui nous défendent de la concurrence déloyale, notamment chinoise ; Le soutien apporté à l’agriculture via la Politique Agricole Commune (PAC) ; La négociation de traités commerciaux de libre échange : notable via le large choix de produits offert aux consommateurs européens ;  La communautarisation du réseau électrique ; les subventions européennes dans divers secteurs ; Le droit européen et les cours offertes aux citoyens : la Cour de justice de l’UE (CJUE) et la Cours européenne des droits de l’homme (CEDH).

GROUPE 3

Le troisième groupe a ensuite présenté les conclusions de ses échanges. Le porte-parole a expliqué que la table avait abordé la question « Que fait l’Europe pour moi ? » par rapport à un sujet d’actualité : le Brexit. Ainsi le groupe s’était plutôt demandé : « Que va perdre le Royaume-Uni ? ».

Voici la liste exhaustive des points énoncés :  Toutes les régulations relatives aux normes sanitaires, protectrices du consommateur, qui, pour eux, ont des vertus indéniables dans le quotidien ;  La politique de sécurité interne et externe communautaire, malgré l’absence d’une armée européenne ;  Un phénomène peut-être plus imperceptible, à savoir la capacité qu’a l’appartenance communautaire à niveler par le haut, notamment grâce aux nombreux échanges (aussi bien commerciaux, que plus largement de bonnes pratiques) se déroulant au sein de l’UE ;  Une politique commune de droit d’asile ; L’harmonisation du droit communautaire.

GROUPE 4

Le quatrième groupe a présenté les conclusions de ses débats sous la forme d’une liste. Voici la liste exhaustive des points énoncés :  La politique environnementale et par là la question du glyphosate : bien que l’interdiction totale de ce produit n’ait pas encore été votée, des efforts sont fait à l’échelle européenne afin d’améliorer la qualité de notre environnement ; L’Europe des chercheurs : la mobilité des chercheurs et leurs subventions par les fonds européens ; Le programme Erasmus : ici le groupe a fait une proposition. Erasmus devrait être étendu à l’apprentissage, une initiative déjà abordée par le Gouvernement français, mais qui devrait être étendue à l’échelon communautaire. La protection de nos données personnelles via le règlement général pour la protection des données personnelles (RGPD) ; La monnaie unique : la porte-parole a mentionné que la stabilité financière provenait de l’euro ;  La libre circulation des personnes ; L’ouverture culturelle, enfin, qui est essentielle.

GROUPE 5

Le porte-parole du groupe a abordé la restitution des échanges de son groupe avec un mot clé : l’ouverture. En effet, chaque apport de l’UE mentionné par les membres composant le groupe, faisait échos à la notion d’ouverture.
Voici la liste exhaustive des points énoncés : Le programme Erasmus ; Les politiques communautaires d’innovation industrielle, permettant la communautarisation des structures, tel que le réseau électrique. Sur ce même point, le porte-parole fait part de son expérience et émet un bémol : ancien cadre dans le secteur biologique, il affirme que son secteur a subi une restructuration trop rapide et dangereuse à sa prospérité économique. Il appelait donc à la vigilance quant à l’harmonisation règlementaire et à l’importance de prendre en compte chaque partie prenante du dit secteur économique. Une ouverture culturelle et une rupture de l’entre-soi grâce aux échanges communautaires.

GROUPE 6

Le sixième groupe a lui proposé trois éléments. Chacun était abordé sous deux angles : selon ses avantages mais aussi ses problématiques.

Voici la liste des trois points énoncés : 1. Les financements européens. Le porte-parole a souligné les bienfaits résultant des fonds européens ; permettant par exemple de financer certains chercheurs. Cependant il a également mentionné leur opacité. Le groupe appelait donc à une plus grande visibilité et une explication de ces financements européens auprès du public. 2. La libre circulation des personnes. Là aussi, cette liberté a tout d’abord été abordée selon son attractivité : permettant le déplacement des citoyens. Le revers de la médaille selon le groupe : également une plus grande liberté donnée au grand banditisme et par conséquent une plus grande difficulté pour les forces de l’ordre à le traquer. 3. La place de l’UE à l’international. Sur ce dernier point, le porte-parole a expliqué que le groupe avait discuté du potentiel avéré de notre marché commun à l’international. Cependant, le porte-parole a aussi relayé l’appel de son groupe pour que l’UE gagne en indépendance à l’international, « fasse front et fasse bloc face aux autres grandes puissances ».

Dernier point conclusif mentionné, le porte-parole mentionnait un manque de représentativité au sein de l’UE et questionnait notamment le rôle des eurodéputés.

GROUPE 7

Le septième groupe a procédé à une liste de ce que l’Europe leur apportait.
Voici la liste exhaustive des points énoncés : La puissance géostratégique de l’UE ; Les faibles coûts ainsi que la diversité des produits proposés aux consommateurs grâce à l’ouverture du marché ; La monnaie unique ; L’exemption des frais bancaires d’un pays membre à l’autre ; La paix apportée par le projet communautaire.

GROUPE 8

Le huitième et dernier groupe a eu des difficultés à dire ce que l’Europe faisait pour eux. Le porte-parole a en effet expliqué que le groupe n’était pas parvenu à mettre en relief, de façon évidente, les apports communautaires. Leurs débats s’étaient plutôt axés sur la difficulté à définir ce que l’UE représentait pour eux, donc leur difficulté à définir ce qu’elle leur apportait au jour le jour.

 

RETRANSCRIPTION DU DEUXIEME TEMPS D’ECHANGE – PRESENTATION DES ASSOCIATIONS AUPRES DU PUBLIC

Dans ce deuxième temps, chaque représentant a exposé les enjeux relatifs à leur association ainsi que leur lien et relation à l’UE et à ses institutions.


SAMUEL SAUVAGE POUR H.O.P

M. Sauvage représentait l’association HOP (Halte à l’Obsolescence Programmée) créée en 2015 et fonctionnant principalement sur la base du bénévolat.

Le président de l’association a tout d’abord commencé par définir l’obsolescence programmée, soit toute stratégie visant à réduire délibérément la durée de vie d’un objet. Si cette pratique est reconnue comme un délit dans la loi française depuis 2015, ce n’est cependant pas encore le cas à l’échelle communautaire. Le Parlement européen (PE) a récemment voté un rapport appelant la Commission européenne à légiférer sur cette problématique, rien n’a cependant été initié à ce jour.

HOP a pour objectif principal de défendre le consommateur, aussi bien en France qu’au sein de l’UE. Pour ce faire, leur action de défense comporte plusieurs volets : La dénonciation, via, par exemple, le dépôt de plaintes; La sensibilisation auprès : Des citoyens ; Des entreprises. La promotion de solutions législatives afin de faciliter et d’encourager une consommation responsable, par exemple, en facilitant la réparation via un accès simplifié aux pièces détachées.

KARINE DE CRESCENZO POUR UFC-QUE CHOISIR

Mme de Crescenzo a débuté par la présentation de son association. Fondée en 1957, UFCQue Choisir est la plus ancienne association de consommateur existant en France. Depuis 1976, elle est capable d’un pouvoir d’action en justice.

L’UE, par son marché unique et ses nombreuses libertés introduites (marchandises, personnes, capitaux, services) a très vite impacté sur le consommateur : ses prix, ses choix et plus largement ses droits. De fait, en 1975 la communauté européenne met en place son premier programme pour le consommateur. Une prérogative renforcée avec le traité de Maastricht en 1992 ou plus récemment avec l’entrée en vigueur du RGPD.

Depuis 1975 et grâce à de nombreux textes législatifs, l’UE a proposé plusieurs solutions pour le consommateur, dans divers secteurs, tel que la régulation relative à l’hygiène des produits consommés. Mme de Crescenzo affirme que l’UE apporte beaucoup à notre vie de tous les jours : le seul problème étant l’application de cette législation européenne.

C’est pourquoi UFC travaille sur le respect du droit du consommateur, aussi bien à l’échelon européen que national, par exemple en essayant d’impacter la législation nationale et/ou européenne. Ici Mme de Crescenzo a expliqué la nécessité de relativiser l’activité de « lobbying » qui est nécessaire, surtout à Bruxelles où 25 000 lobbyistes sont présents pour discuter des propositions législatives avec les décideurs, afin de les orienter au mieux. Sur ce volet européen, la représentante a souligné l’importance des fédérations européennes : réunissant plusieurs groupes d’intérêt nationaux sous un même groupe européen. A ce titre, UFC-Que Choisir appartient à BEUC, le Bureau européen des unions de consommateurs.


PIERRE HENRY POUR FRANCE TERRE D’ASILE

Comme expliqué par M. Henry, le sujet traité par l’association France Terre d’Asile est plus sensible que celui abordé par les deux autres associations de consommateur. Le Président de l’association débute sa présentation en exposant le lien de l’association à l’UE : surtout par rapport aux nombreux textes encadrant le droit d’asile et impactant donc directement sur l’activité de France Terre d’Asile.

Si de nombreux textes et initiatives communautaires sont présents (accord Schengen, Eurodac, directive dite « accueil », directive dite « qualification » et directive dite « procédure »), M. Henry explique que la problématique principale reste l’application de ces textes. De fait, l’UE n’étant « jamais que la somme des Etats membres qui la composent », il importe à chacun d’entre eux de mettre en œuvre ces législations. Face à l’enjeu de la souveraineté nationale vis-à-vis des questions migratoires, les crispations nationales demeurent et le droit d’asile ne parvient pas à être harmonisé.

En effet, face aux « orgueils nationaux », à l’image de l’opposition de Matteo Salvini, Ministre de l’Intérieur italien, l’association appelle à ne pas se fermer à l’Europe, puisque la solidarité est et doit rester le cœur de notre projet communautaire. Il est donc nécessaire de faire plus d’Europe, afin de renforcer la protection : ainsi l’Europe ne doit pas opposer la frontière à la protection, la sureté de ses citoyens à celle des personnes persécutées. Les deux sont compatibles.

Jean Spiri, adjoint au Maire de Courbevoie et Directeur des études de l’Atelier Europe

BILAN DU DEUXIEME TEMPS D’ECHANGE, DIT « BRAINSTORMING » :

La phase dite de brainstorming a découpé la salle et son public en trois groupes : un pour chaque association présente. Chaque groupe était accompagné d’un membre de l’association représentée ainsi que d’un membre d’Atelier Europe, présent pour animer le débat. La discussion a duré environ trente minutes, à l’issue desquelles, un porte-parole pour chacun des groupes a restitué le fruit des débats, sous formes de propositions.

GROUPE 1 AVEC UFC-QUE CHOISIR

La porte-parole explique que le groupe était parti d’un constat : à savoir que les normes européennes en vigueur étaient suffisantes. Les échanges avaient plutôt révélé que la problématique se trouvait dans leur mise en œuvre, dans les moyens de les faire respecter par les entreprises.

Le groupe a relevé par là un deuxième problème : le défaut d’information, surtout en cas de litige individuel transfrontalier. À qui s’adresser ? Comment surmonter les barrières linguistiques ? Le débat avait révélé qu’un certain nombre d’organismes existaient et œuvraient actuellement à la défense des droits des consommateurs, mais qu’ils demeuraient trop méconnus du grand public. La porte-parole a ainsi porté une proposition claire : il faut renforcer l’information auprès du consommateur, lui expliquer ses droits et ses recours possibles auprès des organismes européens/transnationaux.

Le dernier point abordé par le groupe était celui de la gestion des données personnelles en ligne. De nombreuses inquiétudes avaient été émises quant à la possession de données par les géants du numérique (GAFAM tout particulièrement). Sur ce point le porte-parole relayait la deuxième proposition : l’Europe doit se saisir de cette place vacante, agir à vingt-sept pour contrer ces géants et légiférer encore plus sur la protection des données du consommateur.

GROUPE 2 AVEC HOP

Ce groupe de réflexion, également axé sur le droit du consommateur, a opté pour une liste de propositions.

Voici cette liste exhaustive : La France ne doit pas être le seul Etat membre de l’UE à reconnaître l’obsolescence programmée comme un délit. Cette législation française doit être étendue à l’ensemble des Etats membres. Pour ce faire, il est essentiel de créer une grille d’analyse communautaire afin de définir clairement l’obsolescence programmée. Encourager le recyclage à l’échelon européen. Le groupe propose alors deux mesures :  Mettre en place une TVA plus faible pour les services de réparation, à condition que celles-ci soient effectuées sur le territoire européen ;  Instaurer une obligation européenne d’assurance du produit avec une durée raisonnable.

FRANCE TERRE D’ASILE

Le porte-parole a également opté pour une liste de propositions, la voici : Revoir le règlement de Dublin, qui, de toute évidence, ne fonctionne pas actuellement du fait de divergences culturelles, économiques ou encore démographiques. Il faut renforcer la solidarité entre Etats membres pour parvenir à une solution et un accord viable. Ouvrir des ports d’accueil de migrants en Europe et y effectuer un travail sérieux, harmonisé. En effet, le désordre actuel, face à la question migratoire, ne pousse qu’à nourrir le populisme et l’euroscepticisme. Il faut donc créer une véritable agence en charge de la question migratoire, dotée d’un réel budget. Un nom pour cette future agence a été proposé : PROTECT. Sur cette même question budgétaire, le porte-parole a également appelé à augmenter le budget européen dédié à FRONTEX. FRONTEXT devra travailler conjointement avec PROTECT.

L’Europe au Luxembourg, entre institutions et projets

LOGO_PRESIDENCE_2015_RGB_FRTroisième et dernier article sur la présidence luxembourgeoise suite à notre voyage d’études à Luxembourg, les premiers se trouvent ici et .

Un modèle coopératif pour l’UE

Notre rencontre à la Chambre des Députés nous a convaincus des mérites de l’approche politique luxembourgeoise faite de simplicité dans les rapports humains et de pragmatisme dans les choix et les orientations. Cette forte capacité d’adaptation, c’est aussi une approche sans prévention ni tabous des sujets, y compris dans l’acceptation que la puissance publique nationale ne peut pas tout et qu’elle doit agir de concert avec d’autres acteurs, en interne mais aussi au niveau européen et international.

Certes, le Luxembourg par sa taille et par son rôle historique dans la construction communautaire est l’Etat qui a le plus intégré à son ADN l’Europe, y compris en termes identitaires. Cependant, il s’agit aussi d’une volonté politique de prise en compte de tous les niveaux territoriaux, du local à l’européen via le national, afin d’enrichir la décision publique et de la légitimer auprès de citoyens informés en amont des projets. Ici, point de « c’est la faute à Bruxelles »! Les bonnes pratiques devraient faire rougir ses grands voisins: après chaque session plénière du Parlement européen, la Commission des Affaires étrangères de la Chambre fait le point avec les Eurodéputés, lesquels sont associés aux rencontres de députés nationaux avec les citoyens. Tout n’est pas transposable mais une bonne dose de modestie, très répandue aussi localement, devrait aider à franchir les, relatives, barrières culturelles.

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La finance au Luxembourg: vers un terrain de jeu assaini

skylineDeuxième article sur la présidence luxembourgeoise suite à notre voyage d’études à Luxembourg, le premier se trouve ici.

 

Le soft power de l’attractivité

L’attractivité de la place financière luxembourgeoise trouve notamment ses racines dans la Directive SICAV des années 1980, qui fait de l’administration de fonds l’Industrie phare du Luxembourg (3 600 mds € aujourd’hui). Cette Directive crée un passeport qui permet aux fonds de s’installer au Luxembourg, ouvrant la voie à la création d’un marché transfrontalier. Une expertise s’est ensuite construite autour de l’administration de fonds, avec laquelle peu de pays peuvent rivaliser. A cela s’ajoute deux autres activités: la Banque privée (300 mds d’avoir sous gestion) et l’Assurance, réassurance, assurance vie.

Le Luxembourg devient rapidement un Hub continental pour les banques européennes. En 1995, il compte 220 banques. Aujourd’hui, suite à la crise de 2008, il n’y en a plus « que » 143, mais dont les bilans ont globalement augmenté. Parmi les autres attraits pour les entreprises, il faut mentionner un cadre juridique très stable, la TVA la plus basse d’Europe ou la possibilité d’enregistrer des statuts d’entreprises directement en Anglais. En termes d’ouverture, le Luxembourg est le premier pays à accueillir une banque chinoise et joue aujourd’hui un rôle dans l’introduction du Yuan comme monnaie d’investissement. La plupart des fonds qui investissent en Chine d’ailleurs sont Luxembourgeois. Le pays s’intéresse depuis les années 1980 à la finance islamique qui impose justice, équité et transparence et se distingue des pratiques financières conventionnelles par une conception différente de la valeur du capital et du travail.

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Le Luxembourg, un laboratoire européen

LOGO_PRESIDENCE_2015_RGB_FRL’Atelier Europe a arpenté le Grand-Duché durant deux jours. A la veille d’un Conseil ECOFIN et à mi-parcours de la Présidence luxembourgeoise de l’UE, nous avons été cordialement reçus par des juristes, des diplomates, des parlementaires et des fonctionnaires européens, pour une série d’entretiens entre actualité brulante et priorités de long terme. Voici, en trois épisodes, le compte-rendu de ces rencontres sur le Luxembourg, la finance et les institutions européennes.

 

Le Luxembourg, petit pays et Grand-Duché

Comment un petit territoire, ancien « Département des forêts » sous Napoléon, a-t-il su tirer parti des contraintes de son histoire et de sa géographie pour devenir une place financière de premier plan et un pays cofondateur des Communautés européennes? Voyager au Luxembourg, c’est se poser inévitablement cette question, qui n’est autre que celle des avantages comparatifs, chère à l’économiste Ricardo. Voyager au Luxembourg, c’est également interroger la diversification, cet art de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier économique, qu’il s’agisse d’industrie, de finance ou de services. Pays ouvert sur l’extérieur, le Luxembourg s’avère en fait un laboratoire de l’Europe. La Monarchie constitutionnelle y accueille depuis leur fondation des institutions clés, de la CECA de jadis à la Cour de Justice, en passant par la Cour des comptes. Au croisement de plusieurs identités culturelles, le Luxembourg fait bien souvent figure de point d’équilibre dans l’intérêt général communautaire.

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L’Europe s’invite à Hénin-Beaumont

En ce début 2015, l’Atelier-Europe sort des sentiers battus. Outre les traditionnels voyages dans les capitales européennes, nous avons en effet décidé cette année de parcourir notre propre pays, pour rencontrer mieux nos compatriotes, et confronter notre regard sur l’Europe avec celui de nos contemporains dans les régions.

Label_anglaiseA mi-chemin de Paris et de Bruxelles, donc, après avoir consulté les statistiques des plus faibles participations aux élections européennes (38,5 % en l’occurence), nous nous rendions, ce 15 janvier au soir, en la noble ville de Hénin-Beaumont (27.000 habitants). Quoi de plus stimulant pour nous que ce bout de Nord-Pas-de-Calais au passé illustre (la vie des charbonnages) mais à l’économie difficile (seulement 40% d’actifs aujourd’hui), au symbole frappant (le résultat des dernières municipales) mais aussi aux anecdotes glorieuses (en 1870, Hénin fut la seule ville de France défendue avec succès par ses habitants contre les armées allemandes).

Notre débat sur l’Europe se déroule dans un café au look irlandais (merci le traité de Lisbonne) et dénommé « Label anglaise » (merci le référendum britannique de 2017). Nous voilà au cœur du sujet.

L’un des beaux moments dans un débat est toujours celui où les participants quittent le terrain du déjà-vu et des postures pour donner leur avis personnel. Or c’est bien ce que nous avons vécu dans ce mémorable café, nous cinq (Jérôme, Michaël, Raphaël, Quentin et Emmanuel) et la petite vingtaine de personnes venues nous rejoindre. Un grand merci à Bernard, notre guide, notre intermédiaire, qui nous présentait à cette assemblée, non d’ailleurs sans nous avoir fait visiter la ville peu avant.

Un vrai débat interpersonnel, donc, où nous avons pu délaisser « ce que les médias disent de l’Europe » (en mal, forcément) pour aller vers « ce que nous ressentons et ce que nous voudrions qu’elle soit ». Le débat fut largement dominé par les questions économiques et sociales et peu, ou pas, finalement, par les questions migratoires dont on aurait pu croire qu’elles soient ressenties dans le Nord. Bruxelles est-elle « la pire des oligarchies », comme on l’a entendu brièvement, ou un projet « jamais vu sur la terre, et dont on peut être fier » ? Faut-il accuser l’Europe de ce qu’elle ne fait pas (elle n’a pas sauvé les charbonnages, par exemple) ou espérer qu’elle fasse plus (pour la jeunesse, par exemple). Une Europe fiscale et sociale nous manque, oui, conviennent les participants. Mais n’est-ce pas alors qu’il nous faut plus d’Europe ?…et si c’est le cas, de quel type  : une « Europe politique » ou une Europe confédérée ? je vous laisse imaginer la suite !

Toutes les questions, certes, n’ont pas trouvé leur réponse dans ce café de la place Wagon à Hénin. Mais le déplacement, pour nous autres de Paris et de Bruxelles, en valait largement la chandelle. Un sentiment d’ouverture et de nouveauté. Merci, Héninois et Héninoises que nous avons pu croiser le temps d’une soirée ! La suite, dans une autre ville d’un tour de France qui ne fait que commencer.

Emmanuel Vivet