En ce début 2015, l’Atelier-Europe sort des sentiers battus. Outre les traditionnels voyages dans les capitales européennes, nous avons en effet décidé cette année de parcourir notre propre pays, pour rencontrer mieux nos compatriotes, et confronter notre regard sur l’Europe avec celui de nos contemporains dans les régions.
A mi-chemin de Paris et de Bruxelles, donc, après avoir consulté les statistiques des plus faibles participations aux élections européennes (38,5 % en l’occurence), nous nous rendions, ce 15 janvier au soir, en la noble ville de Hénin-Beaumont (27.000 habitants). Quoi de plus stimulant pour nous que ce bout de Nord-Pas-de-Calais au passé illustre (la vie des charbonnages) mais à l’économie difficile (seulement 40% d’actifs aujourd’hui), au symbole frappant (le résultat des dernières municipales) mais aussi aux anecdotes glorieuses (en 1870, Hénin fut la seule ville de France défendue avec succès par ses habitants contre les armées allemandes).
Notre débat sur l’Europe se déroule dans un café au look irlandais (merci le traité de Lisbonne) et dénommé « Label anglaise » (merci le référendum britannique de 2017). Nous voilà au cœur du sujet.
L’un des beaux moments dans un débat est toujours celui où les participants quittent le terrain du déjà-vu et des postures pour donner leur avis personnel. Or c’est bien ce que nous avons vécu dans ce mémorable café, nous cinq (Jérôme, Michaël, Raphaël, Quentin et Emmanuel) et la petite vingtaine de personnes venues nous rejoindre. Un grand merci à Bernard, notre guide, notre intermédiaire, qui nous présentait à cette assemblée, non d’ailleurs sans nous avoir fait visiter la ville peu avant.
Un vrai débat interpersonnel, donc, où nous avons pu délaisser « ce que les médias disent de l’Europe » (en mal, forcément) pour aller vers « ce que nous ressentons et ce que nous voudrions qu’elle soit ». Le débat fut largement dominé par les questions économiques et sociales et peu, ou pas, finalement, par les questions migratoires dont on aurait pu croire qu’elles soient ressenties dans le Nord. Bruxelles est-elle « la pire des oligarchies », comme on l’a entendu brièvement, ou un projet « jamais vu sur la terre, et dont on peut être fier » ? Faut-il accuser l’Europe de ce qu’elle ne fait pas (elle n’a pas sauvé les charbonnages, par exemple) ou espérer qu’elle fasse plus (pour la jeunesse, par exemple). Une Europe fiscale et sociale nous manque, oui, conviennent les participants. Mais n’est-ce pas alors qu’il nous faut plus d’Europe ?…et si c’est le cas, de quel type : une « Europe politique » ou une Europe confédérée ? je vous laisse imaginer la suite !
Toutes les questions, certes, n’ont pas trouvé leur réponse dans ce café de la place Wagon à Hénin. Mais le déplacement, pour nous autres de Paris et de Bruxelles, en valait largement la chandelle. Un sentiment d’ouverture et de nouveauté. Merci, Héninois et Héninoises que nous avons pu croiser le temps d’une soirée ! La suite, dans une autre ville d’un tour de France qui ne fait que commencer.
Emmanuel Vivet