« Une Europe renforcée »

Une mise en perspectives des présidences française et tchèque du Conseil de l’UE.

Jérome Brouillet, Directeur de cabinet de Laurence Boone, Secrétaire d’Etat chargée de l’Europe et Michal Fleischmann, Ambassadeur de République tchèque en France.
Echange modéré par Aymeric Bourdin, président de l’Atelier Europe.

A l’occasion du traditionnel Petit déjeuner – débat au Sénat, le 17 novembre, l’Atelier Europe et le Mouvement Européen réunissaient Michal Fleischmann, Ambassadeur de République tchèque en France, et Jérôme Brouillet, directeur de cabinet de Laurence Boone, secrétaire d’Etat chargée de l’Europe.

L’occasion de revenir sur les enjeux et réalisations des présidences françaises et tchèques et d’en dégager les synergies. Nombreuses, celles-ci se sont manifestées par des priorités communes, qu’il s’agisse d’accroître la collaboration européenne en matière de souveraineté énergétique mais aussi numérique. Si la présidence française fût marquée par l’adoption du « Paquet climat », non sans difficulté, la République tchèque assure la relève et poursuivra le travail pour trouver des compromis entre membres de l’UE, déterminés à lutter au niveau européen contre le réchauffement climatique. Dans cette perspective, Jérôme Brouillet rappelle : « On sous-estime souvent la continuité entre les présidences » d’où l’importance ici, de souligner les défis mais aussi de célébrer la « fantastique unité » qui caractérise l’Union Européenne.

L’unité de l’Europe, comme le rappelle l’Ambassadeur, tient avant tout au compromis. Se mettre d’accord est au cœur du processus européen, et représente la clef pour une Europe souveraine. La notion de souveraineté, chère à la France, a d’ailleurs donné lieu à un développement philosophique, Jérôme Brouillet replaçant le concept dans son développement historique pour finalement retenir comme définition « la capacité de l’Europe à adopter ses propres lois et à se doter des moyens pour les faire respecter ».

Enfin, la réponse européenne à l’agression russe en Ukraine fait office de fil conducteur entre les deux présidences du conseil de l’UE. Cet événement a bousculé les priorités des uns et des autres, se hissant au rang de préoccupation première, tout en essayant, pour les deux Etats, de ne pas éclipser les sujets qu’ils souhaitaient mettre à l’agenda. La malheureuse expérience de la guerre en Ukraine aurait pu diviser l’Europe, c’est ce que les Russes souhaitaient, indique Monsieur Fleischmann. Mais il n’en n’est rien, c’est bien l’unité dans la condamnation et dans la réponse qui a brillé. En guise d’avertissement, il rappelle que l’Etat de droit est à la fois essentiel et fragile, aujourd’hui menacé et attaqué. La position tchèque est sans équivoque et poursuit alors les réponses entamées sous présidence française : soutenir les Ukrainiens et sanctionner les responsables.

Pour conclure les interventions sur une note plus positive, aujourd’hui plus que jamais, l’Union Européenne souhaite remettre au cœur de son existence le lien fort entre citoyens et institutions. Ces derniers ont parfois évoqué lors des questions le vote à la majorité simple comme levier d’efficacité de la politique européenne. A ce propos, Monsieur Fleischmann a pu dessiner la position de la République tchèque : « La plupart des décisions qui se prennent dans l’UE sont déjà votées à la majorité simple. Il y a tout de même des désaccords entre les pays. La République Tchèque est ouverte au vote à la majorité simple. Toutefois il faut qu’on puisse avoir une garantie de s’opposer à certaines décisions lorsque celles-ci touchent à notre souveraineté. » Une piste pour la Suède, qui prendra la présidence du Conseil de l’UE le 1er janvier ? En tout cas, une question qui s’inscrira dans l’ambition commune du trio de présidences : protéger les citoyens et les libertés, en remettant au cœur du projet européen les valeurs communes, en gardant la boussole stratégique de l’Union et en renforçant les moyens de coopération.

-Lisa Despinasse