Patrick Gaubert, eurodéputé, vous parle d’Europe concrète !
1) Le Parlement européen est-il un vrai parlement?
Représentant environ 450 millions de citoyens, le Parlement européen est le corps parlementaire de l’Union européenne directement élu tous les cinq ans depuis 1979. Il est un « vrai parlement » en ce sens qu’avec le Conseil des Ministres, il participe à l’élaboration des législations européennes. Il peut déposer des amendements et user de son veto dans certains domaines. Dans d’autres, il dispose d’un rôle consultatif. Toutefois, le Parlement européen diffère sur un point du parlement national: il ne propose pas lui-même des projets de lois, ce pouvoir étant réservé à la Commission.
2) A quoi sert un Eurodéputé?
Élu directement par les citoyens, le député européen représente les intérêts de ces derniers dans la construction de l’Union européenne. Il contrôle l’action de la Commission européenne, vote et contrôle les budgets de l’Union et participe à l’élaboration des législations communautaires. Chaque député européen fait parti d’une ou plusieurs commissions parlementaires qui traitent d’un domaine particulier. En tant que vice-président de la commission des Libertés civiles, de la Justice et des Affaires intérieures, j’ai entre autres contribué à la réflexion sur l’immigration légale, illégale et la politique d’intégration en élaborant un rapport, voté en juin 2005, dans lequel je propose des
mesures concrètes pour l’Union européenne. Membre de la commission des Affaires étrangères, j’ai travaillé, en tant que rapporteur pour avis, sur la mise en place de l’année 2008, Année européenne du Dialogue interculturel.
3) Comment mieux faire entendre la voix des citoyens européens?
Le lien évident et le plus efficace entre les instances européennes et les citoyens est sans nul doute le député européen. Nous représentons au mieux les préoccupations de nos concitoyens lors de l’élaboration des législations communautaires.
Toutefois, un des problèmes majeurs reste le manque de relais de nos activités et de celle du Parlement européen par les médias. Cette
insuffisance d’intérêts par les médias nuit en quelque sens à la visibilité de notre action en faveur des préoccupations citoyennes.
4) A quoi ressemble l’agenda d’un député européen?
Chaque semaine parlementaire correspond à une activité particulière:
– un minimum de deux semaines par mois est consacré aux réunions des commissions parlementaires. Les députés débattent des rapports, les amendent et procèdent au vote.
– la semaine qui suit est consacrée aux réunions des groupes politiques. Ces derniers définissent leurs priorités et positions sur les rapports à l’ordre du jour de la séance plénière.
– Enfin, la semaine suivante se tient la session plénière au siège à Strasbourg. L’ensemble des députés européens adoptent alors les rapports votés en commission et débattent de sujets d’actualité.
Quotidiennement, le député travaille sur les rapports en cours dans ses commissions en discutant avec différentes personnes: citoyens européens, représentants officiels, administrateurs, notamment de la Commission européenne, experts représentant la société
civile et députés de son groupe et des autres groupes politiques. Il reçoit dans les bâtiments du Parlement des groupes de visiteurs. Il est
aussi amené à effectuer des déplacements à l’étranger dans le cadre de ses activités parlementaires et, en même temps, consacre du temps à la circonscription dont il est l’élu.
Patrick Gaubert
Député européen
Vice-président de la commission
des Libertés civiles, de la Justice et des Affaires intérieures
Membre de l’Assemblée Parlementaire Paritaire Afrique-Caraïbes-Pacifique / UE
Membre suppléant de la commission des Affaires étrangères et de la sous-commission des droits de l’Homme
www.patrickgaubert.net
Un très grand merci, monsieur le député européen, pour ces éclairages !
Françoise Grossetête, Député européen UMP, Vice Président du Groupe du PPE-DE, répond aux questions des Jeunes Actifs
Pourriez-vous expliquer
le processus législatif européen, de l'idée à l'application au
quotidien?
Prenons l'exemple d'un texte régi sous le principe de la
co-décision.
La
Commission européenne dispose du droit d'initiative, c'est elle qui
propose les textes européens qu'elle transmet par la suite au Conseil
des Ministres et au Parlement européen. En aucun cas la Commission
européenne ne détient le pouvoir politique, contrairement à ce que l'on a
voulu faire croire avec la proposition de directive sur "les services".
En effet, Parlement européen et Conseil des Ministres ont la
possibilité de réécrire entièrement une proposition de la Commission
européenne.
Une fois la proposition de la Commission européenne transmise au
Parlement européen, ce dernier décide la commission parlementaire
compétente, et c'est au sein de cette dernière que sera désigné un
rapporteur pour le Parlement européen. Ce rapporteur sera alors entouré
de députés nommés "shadow rapporteur" qui suivront principalement ce
texte pour leur groupe politique respectif. Pour autant chaque député de
la commission parlementaire saisie a la possibilité de déposer des
amendements.
Le premier travail d'amendements sur un texte s'effectue donc
dans la commission parlementaire saisie, qui votera un texte qu'elle
proposera à la plénière. La séance plénière reçoit les amendements et
vote à la majorité qualifiée. Ainsi s'achève la première lecture.
Ce texte adopté par le Parlement
européen part pour examen au Conseil des ministres de l'Union qui peut
faire sien certains amendement du Parlement européen qui sont alors
considérés comme définitivement adoptés, en rejetter d'autres ou bien en
proposer de nouveaux. Ce nouveau texte s'appelle alors la position
commune. C'est un peu le principe de navette que nous connaissons en
France entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
Cette position commune est alors
renvoyée au Parlement européen pour un examen en seconde lecture. La
commission parlementaire saisie au fond réexamine ce nouveau texte et
peut soit redéposer des amendements qui ont été rejetés par le Conseil,
soit proposer des amendements en vue de trouver un compromis avec le
Conseil des Ministres. Ce texte modifié fait alors l'objet d'un vote au
sein de la commission parlementaire puis il est envoyé en séance
plénière. Au cours de la séance plénière de la deuxième lecture, seuls
peuvent être adoptés les amendements qui recueillent une majorité
absolue, à savoir un minimum de 367 voix.
Sur la base du texte voté en
seconde lecture par le Parlement européen, soit le Conseil des ministres
est d'accord avec les amendements, et le texte est considéré comme
définitivement adopté, soit il existe encore un désaccord et s'ouvre
alors ce que l'on appelle une procédure de conciliation. Cette procédure
est encadrée par une date limite pendant laquelle le Parlement européen
et le Conseil des ministres vont négocier pour s'accorder sur les mêmes
termes. Une fois cet accord trouvé, il revient au final au Parlement
européen de l'adopter définitivement.
Ce texte sera par la suite publié
au Journal officiel des communautés puis, si il s'agit d'un règlement
européen, il sera appliqué de suite, et, si il s'agit d'une directive,
celle ci devra être transposée dans le droit national des Etats membres
pour une application au quotidien.
–
Quelles réformes devraient être apportées à ce processus?
3 axes de réformes
semblent indispensables : la première consiste à automatiquement
réaliser une étude d'impact économique, social et environnemental des
propositions de directives et règlements européens. Sous l'impulsion de
l'UMP, le Groupe du PPE-DE au Parlement européen a été le premier à
demander cet instrument politique. En effet, ces études d'impact doivent
nous permettre d'améliorer notre connaissance sur les conséquences des
législations européennes étudiées.
La
seconde réforme nécessaire est celle de la simplification de notre
corpus législatif. Il faut clarifier les normes, les rendre plus
facilement accessibles, c'est à dire concrètement transposables en droit
national, et donc applicables.
La grande carence actuelle est la non transposition des
directives dans les droits nationaux. Aussi, et c'est la troisième
réforme que je suggère, nous devrions mieux contrôler cette application
et le Parlement doit davantage s'engager dans ce suivi important.
– A quoi ressemble l'agenda d'un député européen?
Le lundi matin je travaille la plupart du temps à la mairie de
Saint-Etienne, puis je pars à Bruxelles où je reste jusqu'au jeudi en
début d'après midi. Au Parlement, l'agenda est découpé par les réunions
de commissions parlementaires, les réunions de Groupes, les séances
plénières, les rencontres avec les lobbys, les associations, la
préparation des dossiers, les réponses aux différents courriers,…
Puis, le jeudi en entrant, bien souvent je me consacre au Parc Naturel
Régional du Pilat que je préside. Le vendredi, le samedi et toujours le
dimanche matin, je privilégie le travail de terrain au sein de ma "trop
vaste" circonscription qui comprend Rhône Alpes, Paca et la Corse. Et le
lundi, je recommence… bref, c'est un travail qui me prends 7 jours
sur 7, mais qui me passionne !
Françoise Grossetête
Député
européen UMP
Vice Président du Groupe du PPE-DE
Un très grand merci à madame la députée
européenne pour sa contribution !
Marie-Hélène Descamps, Député européen UMP, contribue au débat !
A quoi sert un
eurodéputé?
Le député européen a un premier devoir: défendre les droits des
citoyens européens. L'objectif reconnu est d'améliorer leur qualité de
vie. Depuis 1979, les députés sont élus au suffrage universel direct
pour une durée de cinq ans. Les dernières élections européennes ont eu
lieu en juin 2004. Pour la première fois, en France, les députés ont été
élus sur un scrutin de liste à travers 8 grandes Régions. Doté à l'origine de pouvoirs très
limités, le Parlement européen est parvenu à obtenir progressivement une
vraie influence dans l'espace décisionnel européen. C'est surtout dans
le champ législatif que l'évolution du Parlement a été la plus
spectaculaire. Avec les traités successifs, la procédure dite de
"codécision" s'est élargie. Les initiatives soumises à la procédure de
"codécision" obligent le Conseil et le Parlement à trouver un terrain
d'entente sous peine de voir ce dernier exercer un droit de veto en
rejetant la proposition en dernière instance. Parmi les matières
soumises aujourd'hui à la "codécision", citons toutes les questions en
rapport avec le marché intérieur, la protection des consommateurs, la
santé, l'environnement, la culture, l'éducation ou encore la libre
circulation des travailleurs. Des sujets, parmi d'autres, qui touchent
directement la vie des citoyens dont les eurodéputés sont les
représentants directs.
Aujourd’hui, le travail d’un député national consiste
pour plus de 60% de son activité de parlementaire à traduire en droit
national les dispositions prises au niveau de l'Union européenne. A
titre d'exemple, on peut citer le récent débat animé à l'Assemblée
nationale concernant la transposition dans le droit français de la
directive européenne sur le droit d'auteur.
Le Parlement Européen est-il un
vrai Parlement ?
Pour comprendre le fonctionnement des institutions
européennes, il est indispensable de le différencier du fonctionnement
des institutions de son propre pays.
L'Union européenne se caractérise par le "triangle
institutionnel": Commission, Parlement, Conseil. Il détermine le pouvoir
décisionnel. En ce sens, le Parlement européen n'est guère comparable à
un Parlement national et apparaît comme le seul véritable Parlement
multinational au monde. A l'heure actuelle il exerce quatre
fonctions: législative, politique, budgétaire et de contrôle. De manière
générale, la Commission européenne propose la nouvelle législation,
mais l'adoption des actes législatifs incombe au Conseil et au
Parlement.
L'activité
des commissions parlementaires contribue au renforcement de
l'influence du Parlement européen. Ces commissions au nombre de 23
rédigent des rapports sur différents sujets méritant l'attention des
institutions communautaires et invitent les membres compétents de la
Commission européenne à venir prendre position ou à s'expliquer devant
elles et/ou pendant la session plénière au moment du vote.
Entre autres initiatives
parlementaires, chaque membre du Parlement européen peut soulever
n'importe quel point de l'activité de la Commission européenne et lui
demander des comptes par la voie de questions écrites ou orales. La
Commission a l'obligation légale d'y répondre. Tout député peut, en
outre, déposer une proposition de résolution sur un sujet qui entre dans
le cadre des activités de l’Union. La commission compétente décide
alors de la procédure à suivre, émettre un avis ou élaborer un rapport .
Comment mieux faire entendre
la voix des citoyens européens ?
Les citoyens doivent savoir qu'ils peuvent défendre
leurs droits grâce au droit communautaire. Ils peuvent le faire en
déposant une plainte auprès de la Commission ou une pétition auprès du
Parlement européen (articles 21 et 194 TCE). Ce dernier dispose en effet
d'une commission des pétitions. Tout individu (même non citoyen d'un
des Etats membres et seulement résidant dans l’Union européenne) peut
adresser au Parlement européen, individuellement ou collectivement, une
pétition au sujet d’une question relevant d’un domaine de compétence de
l’Union européenne et le concernant directement. Les citoyens peuvent
également présenter une plainte au Médiateur européen sur un cas de
mauvaise administration dans l'action des institutions et organes de
l'Union européenne.
Le projet de Constitution européenne permettrait des avancées
intéressantes en la matière en créant de nouveaux liens entre l'Europe
et les citoyens notamment à travers la création d'un droit d'initiative
populaire permettant à 1Million de citoyens- nombre qui peut être
facilement atteint grâce à Internet – de soumettre à la Commission une
invitation à légiférer sur un aspect relevant de ses compétences.
Le processus de ratification de la
Constitution étant pour le moment mis en veille, la Commission
européenne a engagé une vaste période de réflexion à travers le plan D
comme démocratie, dialogue et débat ayant pour objectif de poser les
bases d'un dialogue approfondi sur l’avenir de l’Europe. Parmi les
actions envisagées, sont notamment prévues une série intensive de
visites des commissaires dans les États membres afin d'informer les
citoyens sur les futurs enjeux européens.
Marie-Hélène
Descamps
Député européen UMP
Tous nos
remerciements, madame la Députée, pour votre aimable contribution.
Le débat avec les eurodéputés continue !
Parti Populaire Français, voici une nouvelle série de questions
nous leur avons envoyée à ce jour :
le processus législatif
européen, de l'idée à l'application au
quotidien?
ce processus?
européen?
Lundis de l'Europe.