D’après l’Indice européen 2008 des consommateurs de
soins de santé (Euro Health Consumer Index ou EHCI) publié le 13
novembre à Bruxelles le système de santé des Pays-Bas a été considéré
comme le meilleur d’Europe.
Ils arrivent en tête du classement
pour la première fois avec suivi du Danemark, de l’Autriche (gagnante
de l’EHCI en 2007), du Luxembourg et de la Suède et de l’Allemagne. La
France n’arrive qu’en 10e position.
Ce
classement est basé sur les résultats de l’indice EHCI, qui mesure la
qualité globale des systèmes de soins de santé dans 31 pays. L’EHCI est
une émanation de l’Index suédois de la consommation et des soins de
santé. Les systèmes de santé publics et privés sont pris en compte. En
tout, 34 indicateurs sont recensés pour élaborer le classement
européen. L’accent est mis sur les droits et l’information des
patients, les temps d’attente pour les soins ordinaires, les résultats
médicaux, la facilité d’utilisation, les prises en charge de
prestations et de l'accès aux médicaments.
L’EHCI
se veut ainsi un groupe innovant en matière d’évaluation. Il se place
du côté des patients et pas seulement du côté des indicateurs officiels
de santé. Il cherche à donner plus de poids aux consommateurs et dès
lors à améliorer les résultats thérapeutiques. Cette démarche est
importante et utile pour les patients, du point de vue européen. C’est
évident que les patients et leurs familles cherchent à prendre
connaissance des meilleurs standards de qualité en matière de
traitement dans leur pays ; il est donc capital de pouvoir comparer les
standards entre les différents pays. C’est d’autant plus important
qu’on a introduit le principe de la mobilité des patients au sein de
l’Union, ce qui se traduit par une volonté de plus en plus explicite
des patients à pouvoir bénéficier des meilleurs traitements possibles.
Après
avoir respectivement occupé en 2006 et 2007 la 1 ère et 3e place de ce
classement, la France dégringole cette année à la 10e place.
Deux facteurs sont mis en cause pour expliquer ce recul.
D’une
part, les auteurs critiquent le système de parcours de soins français
limitant l’accès à certains spécialistes : « rien ne prouve que le
filtrage de l’accès aux soins primaires permette de faire des
économies, restreindre l’accès aux soins des spécialistes est
probablement une solution inappropriée » explique le Dr Björnberg,
Directeur de recherche pour l’Indice européen des consommateurs.
D’autre
part, selon ce rapport, en dépit de soins de haut niveau, la France
accuserait un certain retard dans l’informatisation de son système de
santé (E-santé). Les outils de la télésanté et de la télémédecine, que
l’on peut regrouper sous le terme générique de la « e-santé »,
recouvrent l’ensemble des techniques qui permettent de transmettre, à
distance et grâce aux technologies de l’internet, des conseils, des
avis et une expertise médicale pour améliorer la qualité de la prise en
charge des patients.
À la lumière de ce
constat, la France a d’ores et déjà initié une politique de
développement de l’E-santé sur l’ensemble de son territoire. La
stratégie ministérielle présentée par Roselyne Bachelot en conseil des
ministres repose sur quatre piliers : les systèmes d’information
hospitaliers (SIH), les services de partage de données de santé, la
télésanté, et la gouvernance d’ensemble du système d’information de
santé. Pour mettre ces techniques à disposition du plus grand nombre,
le Gouvernement a retenu un certain nombre de mesures entrant en
vigueur dès 2009, qui s’ajoutent au déploiement prévu à partir de 2010
du dossier médical personnel (DMP).
Comme
leurs voisins, les Pays-Bas ont connu un accroissement rapide de leurs
dépenses d'assurance maladie. Depuis le 1er janvier 2006, les Pays-Bas
ont un nouveau système d’assurance maladie. Cette réforme est le
résultat de dizaines d’années de discussions et a pu être engagée grâce
au consensus politique régnant dans le pays.
Le système antérieur présentait selon le Ministère de la Santé, plusieurs défauts :
- Trop de systèmes différents (caisse maladie, assurances privées, régime particuliers)
- Peu ou pas de choix pour l’assuré
- Peu d’incitation à la concurrence pour les assureurs
- Peu ou pas de pression sur les prestataires les incitant à fournir de meilleures prestations
- Inégalités liées aux primes et aux revenus.
Ainsi
dans le nouveau système, le gouvernement néerlandais a choisi de
responsabiliser davantage les assurés par l'augmentation de certaines
franchises et le "déremboursement" de certaines prestations telles que
la kinésithérapie.
D’autres mesures viennent
compléter cette démarche globale de maîtrise des dépenses de santé
comme la réduction forfaitaire de 8% du budget des hôpitaux,
l'incitation à la consommation de génériques et la mise en place d'un
financement par pathologie.
Le gouvernement
a par ailleurs entrepris une refonte de l'organisation du système de
santé afin de le simplifier et d'en accroître l’efficacité. Si l'Etat
conserve la responsabilité de la qualité des soins, de leur
accessibilité et de leur coût global, il délègue désormais la gestion
des dépenses de santé à des assureurs et à des fournisseurs de soins
privés.
Ses effets, globalement positifs,
n'ont cependant pas résolu tous les problèmes : la démographie des
professions de santé est inquiétante ; de plus, la dynamique
inflationniste des dépenses de santé n’a été semble-il qu’endiguée.
L’introduction
des mécanismes concurrentiels au sein des systèmes de santé est l’une
des orientations suivies par les réformes en Europe, depuis la mise en
place de la réforme Thatcher en Grande-Bretagne et le projet Dekker aux
Pays-Bas à la fin des années 1980.
À
l’exception de l’Autriche qui n’envisage pas d’introduire des logiques
de marchés au sein des systèmes de protection sociale, nous voyons que
les premiers du classement comme la Suisse, les Pays-Bas ou
l’Allemagne, ont choisi d’axer leurs réformes récentes sur la notion de
concurrence : concurrence entre les caisses d’assurance maladie ou
concurrence entre les offreurs de soins. Les experts estiment par
ailleurs que le système néerlandais pourrait servir de modèle en vue
d’une réforme du système de santé américain. La réflexion serait aussi
à mener pour une réorientation en profondeur et une homogénéisation des
systèmes nationaux européens. La crise actuelle pourrait avoir un
impact sur cette réflexion et accélérer l’avancée vers l’Europe sociale.
Pour voir l’intégralité du rapport est disponible ici.