par Clara Petitfils
PRESENTATION GENERALE DE L’EVENEMENT :
La Consultation Citoyenne s’est déroulée le 18 octobre 2018 au lycée Lucie Aubrac de Courbevoie, de 15h30 à 17h30.
La thématique abordée était « L’Europe, c’est quoi ? ». L’évènement était organisé par Mme Christine Hennion, députée de la troisième circonscription des Hauts-de-Seine.
Les échanges ont pris place entre les lycéens et les trois intervenants présents :
1. M. Aymeric Bourdin, président du think tank Atelier Europe ;
2. Mme Christine Hennion, députée de la troisième circonscription des Hauts-de-Seine ;
3. M. Thierry Michels, député de la première circonscription du Bas-Rhin.
PRESENTATION DU DEROULE :
La Consultation s’est découpée en huit temps principaux :
1. Le mot d’accueil : assuré par les trois intervenants, soit M. Bourdin, Mme Hennion et M. Michels.
2. La présentation de l’événement : assurée par Atelier Europe. Sur ce temps, le think tank a effectué une contextualisation en introduisant l’objectif des Consultations Citoyennes.
3. La première phase de présentation : « L’Europe, c’est quoi ? ». Sur ce premier temps, Atelier Europe a opéré une présentation générale de l’Union européenne (UE) et de son processus d’intégration en soulevant les nombreux enjeux qui lui incombaient, sur dix minutes. Cette présentation restait générale, les élèves n’ayant pas encore abordé le chapitre européen dans leur programme.
4. La deuxième phase de présentation : « Le fonctionnement des institutions européennes ». Ici Mme Hennion a expliqué le triangle décisionnel européen, son fonctionnement et ses grands enjeux. Ce second temps a également duré dix minutes.
5. La troisième phase de présentation : « Le Parlement européen : rôle et pouvoir ». Sur ce dernier temps, M. Michels a présenté aux lycéens le fonctionnement de cette
institution européenne, son rôle et ses jeux de pouvoir. Ce dernier temps introductif a duré dix minutes.
6. Le temps de questions-réponses : suite aux précédentes explications, nécessaires à une mise en contexte pour ces élèves n’ayant jamais abordé les sujets européens, ce temps de débat offrait un moment d’échanges pour les lycéens.
7. Le temps des propositions : suite aux questions-réponses, les lycéens ont formulé de multiples propositions et recommandations pour le futur de l’UE.
8. Le mot de conclusion : assuré par Mme Hennion et M. Michels.
RESUME DES PARTICIPATIONS DES INTERVENANTS :
Cette partie propose un résumé des trois différentes interventions et essaiera surtout de se concentrer sur la réaction des lycéens, à chaque fois qu’ils sont intervenus. En effet, le but n’est pas tant de retranscrire l’histoire du processus d’intégration européen ou du fonctionnement de ses institutions, mais plutôt de capturer les impressions, interrogations et propositions des élèves.
AYMERIC BOURDIN – L’EUROPE, C’EST QUOI ?
Aymeric Bourdin a ouvert le temps d’explication avec le thème « L’Europe, c’est quoi ? ». Avant de développer son propos, il a d’abord interrogé les élèves en leur demandant : « L’Europe, c’est quoi pour vous ? ». Voici les réponses données :
§ « Un ensemble de pays. » ; § « Une union. » ; § « Des échanges. » ; § « Une monnaie commune à certain pays. » ; § « L’espace Schengen. » ; § « Un continent. » ; § « Le Parlement européen. » ; § « Une puissance mondiale. »
Après ces réponses, l’intervenant s’est attaché à expliquer l’origine du projet européen : celle d’une « organisation politique et administrative ». De fait, cette organisation a une histoire puisque dès la fin de la Premier Guerre Mondiale les Etats européens cherchent à trouver une solution aux conflits. Par exemple via le pan-européanisme proposé par Coudenhove-Kalergi. Ces volontés politiques se traduisent en échec : quelques années plus tard la Seconde Guerre Mondiale survient.
La violence des conflits successifs avec tous ses dégâts poussent les Etats européens à chercher une solution viable. Surtout, le Plan Marshall les motive à coopérer et les pères fondateurs impulseront la mise en œuvre d’une nouvelle forme d’organisation : c’est la naissance de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) en 1951. La communautarisation des deux matières premières à l’effort de guerre permet ainsi symboliquement et économiquement d’enterrer tout futur conflit.
S’en est suivi de multiples propositions d’approfondissements de ce projet européen, fructueuses ou non – tel qu’avec l’échec de la proposition d’une Communauté européenne de Défense (CED), rejetée par la France en 1954.
L’Union qu’on connaît aujourd’hui est donc le fruit d’élargissements et d’approfondissements successifs : offrant de plus en plus de circulation et liberté aux éléments la composant. Aussi bénéfique soit elle, cet espace communautaire reste cependant encore l’objet de nombreux enjeux : le Brexit, la crise de la dette souveraine ou encore le déficit démocratique.
CHRISTINE HENNION – LE FONCTIONNEMENT DES INSITUTITONS EUROPÉENNES
Christine Hennion, en sa qualité de membre de la commission des affaires européennes, a procédé à une présentation des trois principales institutions européennes, selon leur fonction.
Tout d’abord l’organe en charge de la représentativité des intérêts de l’UE, soit la Commission européenne. Cet organe compte pour l’entité administrative et exécutive. Son pouvoir principal relève de la rédaction des textes de droit secondaire (régulations, directives, décisions). À noter que la Commission prépare ces textes sur la base des impulsions données par le Conseil européen.
La Commission se compose de vingt-huit Commissaires, un par Etat membre, chacun en charge d’un portefeuille spécifique, tel que l’économie, le numérique, l’agriculture, etc.
Deuxième point abordé : la représentativité des intérêts relatifs aux Etats membres. Ici, deux institutions à mentionner : § Le Conseil européen : composé des chefs d’Etat et de Gouvernement et en charge de formuler les lignes directrices de l’UE. § Le Conseil de l’Union européenne (UE) : composé des Ministres des Etats membres affectés à l’une des dix configurations du Conseil, chacun spécialisé sur le Conseil en question. À noter qu’ici la présidence est dite « tournante » : changeant tous les six mois au sein des Etats membres. Elle est actuellement détenue pas l’Autriche.
Troisième point : la représentativité des intérêts citoyens par le Parlement européen. Cet organe se compose de sept-cent-cinquante-et-un membres, comprenant son Président, Antonio Tajani.
Sur la configuration du Parlement européen, Mme Hennion aborde alors la question du Brexit et l’enjeu laissé avec les soixante-treize sièges britanniques vacants. Devrait-on affecter certains des sièges restant à une liste transnationale ? Auquel cas, comment déterminer de l’attribution des sièges entre Etats membres ? Ou bien ces sièges devraient-ils être gardés en cas de futur(s) élargissement(s) ?
THIERRY MICHELS – LE ROLE ET POUVOIR DU PARLEMENT EUROPÉEN
Thierry Michels a enfin abordé le Parlement européen plus en détail, en sa qualité de député de la première circonscription du Bas-Rhin accueillant le siège des sessions plénières, à Strasbourg.
Faisant suite à la présentation de Mme Hennion, M. Michels approfondit la question des eurodéputés et notamment par le biais de l’importance des élections européennes. Il rappelle tout d’abord l’importance symbolique et politique de ces élections et du rôle d’eurodéputé : autrefois occupé par des députés nationaux, qui occupaient donc une double-fonction de député et d’eurodéputé, ce mandat exclut désormais tout autre mandat. De fait, un eurodéputé est uniquement dédié à ses citoyens européens. De plus, le suffrage universel direct existe depuis maintenant quarante ans.
Approfondissant ce même sujet, il présente qu’actuellement, un eurodéputé sur quatre est europhobe des suites des élections de 2014. Il insiste donc sur l’importance de penser l’impact de ce vote : les futurs élus répondant de l’avenir des textes européens et plus largement de l’avenir de la construction européenne.
Surtout, au vu du fonctionnement du Parlement européen, l’envoi d’eurodéputés antiEurope, donc de fait isolés, nuit à la formation de coalitions.
Enfin, sur le lieu du siège parlementaire M. Michels présente le débat relatif au double lieu : entre Bruxelles et Strasbourg. D’un point de vue fonctionnel, une centralisation à Bruxelles opèrerait une certaine simplification. Mais il ne faut alors pas négliger la puissance symbolique du siège strasbourgeois : symbole historique de la réconciliation franco-allemande, mais aussi propre à l’UE qui refuse la centralisation de toutes ses institutions au sein d’une seule et même ville et préférant plutôt le partage entre ses Etats membres.
RESTITUTION DE LA SEANCE DE QUESTIONS-REPONSES :
Voici la retranscription de la session de questions-réponses : questions posées par les lycéens et réponses fournies par les intervenants.
Q : Pourquoi faire des Consultations Citoyennes ?
R : Les Consultations Citoyennes répondent à un défi démocratique : une situation globale de déconnexion et d’incompréhension vis-à-vis des institutions européennes et de Bruxelles. Face à ce problème global et structurel la France a impulsé un mouvement de démocratie participative en vue de préparer les prochaines élections européennes. Il s’agit de créer des espaces de dialogues partout à travers l’UE, afin de permettre aux citoyens de s’exprimer et de proposer leurs idées sur l’Europe.
À noter que cette initiative participative n’est pas la première : d’autres formes d’expressions ont été employées par le passé, tel que le referendum de 2005 ou encore les dialogues nationaux pour l’Europe en 1997. Ces exercices participatifs ressurgissent généralement en période de relance européenne.
Q : Pouvez-vous développer sur la question des listes transnationales concernant le Parlement européen ?
R : Cette idée de liste transnationale a été suggérée par la France, mais beaucoup de questions restent en suspens. Sur sa composition : qui ? Quels pays représentés ? Question plus « logistique » aussi : quelle règle électorale ? Une bonne idée donc, mais difficile à réaliser…
Q : Les commissions du Parlement européen ont-elles un véritable rôle ?
R : Oui, au même titre que les commissions au sein de l’Assemblée Nationale, elles proposent des amendements. De plus, il faut noter que le Parlement européen a nettement augmenté ses prérogatives : il décide également du budget européen !
Q : Sur ce budget européen justement, comment expliquer qu’il est si difficile à distribuer entre Etats membres, s’il ne représente qu’1% du PNB ?
R : C’est bien parce que chacun veut obtenir sa part du gâteau ! Sur la taille du budget européen, il faut le relativiser dans la vie quotidienne : s’il ne représente qu’1% du PNB des Etats membres, il est très souvent couplé à de nombreux autres financements publics ou privés.
Q : Est-ce que l’UE a un impact sur le programme scolaire ?
R : La politique d’éducation reste une compétence étatique : il incombe à chaque Etat membre de fixer son propre programme national. Cependant, l’UE a énormément fait pour les études supérieures, notamment grâce au programme Erasmus.
Q : Avez-vous un exemple pour montrer que les pouvoirs du Parlement européen se sont renforcés.
R : Premier exemple : son pouvoir quant à l’approbation du budget puisqu’il a le pouvoir de le rejeter. Dans la pratique également : le Parlement européen propose désormais le futur président de la Commission européenne via le Spitzenkandidat, soit la tête de liste de chaque parti aux élections européennes, pressentie pour présider la Commission. Dernier exemple : les auditions des Commissaires européens.
Q : Pouvez-vous parler des projets de coopération militaire à l’échelle européenne ?
R : La question de coopération militaire est un sujet récurrent et complexe car il touche au cœur de la souveraineté des Etats membres. Ce sujet de coopération européenne est donc éminemment national.
Récemment a été impulsé la création d’un Fonds européen de défenses dédié au financement de matériel commun. Sur une autre forme de défense on peut également penser à la cybsersécurité et aux nombreuses initiatives européennes mises en œuvre pour protéger l’UE et ses Etats membres de cyber-attaques.
Q : Comment on décide à vingt-sept ? Ce n’est pas trop difficile, même impossible parfois ?
R : Décider à vingt-sept est bien évidemment beaucoup plus délicat que de se mettre d’accord à six. Il faut alors prendre en compte le mode de décision selon le sujet abordé : l’unanimité, la majorité simple, la majorité qualifiée, etc. Plus un sujet sera sensible, plus il sera décidé à l’unanimité. Il faut noter ici que le nombre de sujets votés à la majorité qualifié ne cesse d’accroître !
Q : Comment est-ce que vous expliquez le fort taux d’abstention ?
R : Déjà par le manque d’informations ! Aussi pendant très longtemps les Etats et leurs gouvernements ont eu tendance à mettre la faute sur Bruxelles, dès lors qu’ils n’obtenaient pas ce qu’ils voulaient. Lorsqu’on a l’impression que des institutions décident pour nous sans notre consentement, que l’on ne les comprend pas bien, on ne peut pas avoir de réelle prise de conscience sur l’importance de ces élections et donc on s’abstient !
Aussi et plus largement, l’abstention est un phénomène sociologique : qui survient partout, de façon de plus en plus importante et sur tout type d’élections.
Q : Moi j’aimerais que Bruxelles vote des textes qui impactent réellement, comme sur la protection de l’environnement !
R : Justement, l’Europe est très engagée sur certains sujets sensibles pour le public, comme l’environnement avec la transition énergétique. Mais le problème est que l’Europe n’est pas encore suffisamment visible pour ses actions louables.
Q : Vous estimez à combien le taux de participation aux prochaines élections ?
R : On ne peut vraiment pas savoir, le plus possible espérons !
Q : Est-ce que la comptabilisation des votes blancs réels aiderait à remonter le taux de participation ?
R : On ne peut jamais vraiment savoir, mais des études révèlent que la prise en compte des votes blancs permettraient d’augmenter de 1 à 2% le taux de participation. Cela ne compterait alors pas pour une hausse très significative.
Q : Comment vérifier qu’un pays de l’UE respecte bien ce qui lui est imposé ?
R : La Commission européenne joue le rôle de gardienne des traités, notamment grâce à ses agences. Elle peut engager des sanctions en cas de non-respect.
Q : Quelles conditions faut-il respecter pour faire partie de l’UE ?
R : Il y tout un « cahier des charge » à respecter afin de devenir un véritable membre de l’UE. Il comprend des valeurs fondamentales, des normes règlementaires, des normes de gestion, etc.
Il ne faut pas sous-estimer l’importance géostratégique d’un élargissement, notamment visà-vis des pays des Balkans, actuellement très investis par la Chine qui y finance de plus en plus les infrastructures afin d’aider au développement. L’UE a un rôle à jouer ici.
Cependant, il faut être prudent lorsqu’on parle d’élargissement : il ne faut pas que cela se fasse au détriment d’un processus d’approfondissement. On ne gère pas à vingt-huit pays, comme on gère à dix ! Il faut redéfinir les règles du jeu avant toute chose.
LISTE DES PROPOSITIONS :
Le dernier temps des échanges permettait aux élèves de faire leurs propositions sur l’UE et son avenir.
Voici la liste des propositions faites :
§ « Pour la crise migratoire, je propose qu’on prenne des solutions rapides et plus efficaces ! Actuellement les conditions dans lesquelles sont accueillis les migrants sont insuffisantes. Ça doit être une priorité dans le débat européen ! »
§ « Je pense qu’on a un problème par rapport à la citoyenneté européenne : on devrait la valoriser pour savoir réellement ce qu’elle nous apporte au quotidien. Qu’on soit fixé et qu’on sache à quoi ça sert ! »
§ « Il faut qu’on nous explique plus ce qui est fait pour les enjeux environnementaux : on ne nous le dit pas suffisamment, on ne sait pas ce qui se décide. »
§ « Je rebondis sur ce qu’a dit mon camarade : on ne s’approche pas assez de la jeunesse et c’est bien dommage car c’est eux le futur de l’Europe ! »
§ « Il faudrait interdire les politique anti-migratoires car l’échange c’est un principe européen. »
§ « Je pense qu’il faudrait que l’UE apprenne à s’individualiser, à se détacher des puissances internationales pour s’affirmer de son côté, surtout vis-à-vis des EtatsUnis. »
§ « Il faut que l’UE vote des lois plus importantes et utiles, qui ont un vrai impact sur notre quotidien ! »