La souveraineté des États membres est-elle remise en cause par l’UE?

Lors du débat sur le projet de loi relatif à la lutte contre les discriminations, Madame le Secrétaire d'État Nadine Morano
s'est opposée à un amendement car il serait contraire à la volonté de
la Commission qui n'hésiterait pas, le cas échéant, à saisir la CJCE et
faire condamner en manquement la France.

Quelle place reste-t-il au
Parlement français si son pouvoir d'amendement est ainsi restreint ? La
France est-elle encore souveraine ?
Monsieur le Député européen Alain Lamassoure nous répond.



Les
traités ou accords internationaux sont, pour un pays, l’équivalent de
ce qu’est un contrat pour un particulier : ils limitent sa liberté, en
contrepartie d’un avantage supérieur trouvé dans l’application de cet
accord. L’adage juridique dit : « le contrat fait la loi des parties ».
La souveraineté est-elle en cause ? Non, puisque le contrat peut être
modifié. Le mariage est-il un abandon de souveraineté ? Psychologues et
vaudevillistes en débattent à l’infini, mais la question ne se pose pas
vraiment là où le divorce est permis.

Les
lois européennes, elles, sont comparables aux décisions prises par un
syndicat de copropriétaires : elles limitent la liberté de chacun dans
l’intérêt du groupe. Toutefois, l’Union est plus respectueuse de ses
membres que ne l’est la copropriété puisque, lorsque la décision prend
la forme juridique d’une « directive », chaque État peut l’adapter à sa
situation particulière par une loi nationale. La marge de manœuvre
disponible dépend évidemment du sujet.

Il
apparaît que, dans cet exercice de transposition dans son droit
national, la France est un des plus mauvais élèves de la classe
européenne : dans le rapport
sur le citoyen et l’application du droit communautaire que j’ai remis
il y a quelques jours au Président de la République, je donne quelques
exemples, antérieurs à l’actuel gouvernement, de détournement pur et
simple, par les autorités françaises, du sens de lois européennes
pourtant acceptées par elles à Bruxelles ! Alors même que les pays les
plus attachés à la souveraineté nationale, tels le Royaume-Uni et le
Danemark, sont parmi ceux qui honorent le mieux leurs engagements
européens.

La France ne peut évidemment plus se permettre ce genre de fantaisie pendant sa présidence. D’où l’insistance qu’a mise Nadine Morano
pour éviter une trop grande créativité parlementaire sur un point de la
directive en cause pour lequel une interprétation commune était jugée
nécessaire dans tous les États membres.



L'Atelier
Europe remercie chaleureusement Monsieur le Député européen pour sa
participation aux Lundis de l'Europe, ainsi que pour sa disponibilité
et l'aide qu'il lui apporte.

Nous vous invitons à le retrouver sur son site.