Les priorités de la présidence irlandaise de l’Union européenne

1301-IrlandeLa présente note est une modeste synthèse du programme complet de la présidence que l’on peut retrouver dans le volumineux programme de ladite présidence.

I. Contexte et objectifs

Stabilité, emploi et croissance, tels sont les maîtres-mots de la présidence irlandaise.

Sans originalité par ces temps de crise, la croissance était une priorité de la présidence chypriote, elle l’est aussi pour la présidence irlandaise, qui inaugure un nouveau triplet de présidence, suivie par la Lituanie et la Grèce.

Les priorités de la présidence irlandaise ont été annoncées par le Ministre des Affaires étrangères, Eamon Gilmore et le ministre d’État en charge des affaires européennes, Lucinda Creighton, le 17 décembre 2012.

L’Irlande voit en 2013 « une nouvelle phrase de la reprise économique de l’Union européenne ». À l’aune des projections réalisées par les économistes, on peut toutefois douter de cette analyse contextuelle.

La présidence n’hésite pas à mettre en avant son expérience intérieure en matière de relance, fondée sur une fiscalité favorable aux entreprises. Mais cette stratégie a pour conséquence un report de la pression fiscale essentiellement sur les contribuables personnes physiques. Ce modèle n’est donc pas déclinable à l’ensemble des Etats de l’Union européenne, en ce qu’il ne s’inscrit pas nécessairement dans la volonté politique des gouvernements en place.

Pour déterminer les priorités de la présidence, l’Irlande souhaitait faire la différence sur trois objectifs affichés:

  • Une relance centrée sur les citoyens et conçue pour durer,
  • L'investissement dans la croissance favorable à l’emploi et dans les ressources de l’Europe,
  • Un engagement gagnant-gagnant avec les partenaires extérieurs de l’Union européenne.

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Voyage d’études à Dublin

1301-IrlandeL’Atelier Europe se rendra en voyage d’études à Dublin du 18 au 21 avril, à l’occasion de la Présidence irlandaise du Conseil de l’UE.

Ce déplacement s’inscrit dans la continuité d’une tournée des capitales européennes initiée lors de la présidence tchèque, et qui a perduré depuis, à StockholmMadridBruxelles,BudapestVarsovieCopenhague et Nicosie.


Ces voyages ont été l’occasion de rencontrer les gouvernements et acteurs institutionnels, et nous ont permis de mieux comprendre les priorités de chaque présidence, leur mise en œuvre et la carte mentale de l’Europe de nos partenaires.

Programme des rencontres :

Emmanuelle Michelin d’Achon
Ambassadrice auprès de la République d’Irlande

Brendan Halligan
Président du think tank IIEA (Institute of International and European Affairs)

Cabinet du Taoiseach (Premier Ministre)
Lorcan Fullam, directeur adjoint de cabinet, conseiller diplomatique affaires européennes
Gerald Angley, directeur de la communication politique de la Présidence

Dara Murphy
Député du Fine Gael

Michael McGrath
Directeur des affaires européennes et internationales, Ministère des finances

Declan Ganley
Président de Libertas

Un Allemand en Provence

Günter Verheugen de michaelthurm, sur FlickrGünther Verheugen, ancien commissaire européen aux Entreprises et ancien vice-président de la Commission européenne, donnait un discours, ce 26 mars 2013, à l’institut d’études politiques d’Aix en Provence, sur le thème de l’avenir de l’Europe. Son intervention mérite d’être relatée, à la fois convaincue et à la recherche de chemins radicalement nouveaux pour l’avenir de l’UE.

G. Verheugen incarne la première des générations de leaders allemands qui, sous la houlette de Schröder, ont pour la première fois depuis la 2ème Guerre mondiale, adopté une approche plus libre de l’Europe, défendant non seulement l’Allemagne en tant qu’acteur européen, mais aussi en tant qu’Etat ayant ses intérêt à défendre.

L’Union européenne, explique aujourd’hui M. Verheugen à l’issue de son expérience bruxelloise, est prise dans un dilemme : d’une part, il lui est nécessaire de mieux coordonner l’action de ses membres pour faire face à la crise économique, ce qui implique d’intégrer davantage certaines politiques ; d’autre part, il est devenu crucial d’agir autant que possible au niveau national, parce qu’à l’évidence c’est le seul niveau de légitimité démocratique vraiment accepté par les peuples, et que s’en écarter de trop, c’est courir le risque, plus du tout irréaliste, d’une sanction des votes extrêmes, dangereux pour l’Europe elle-même. Dans ces conditions, comment faire ?

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Bepe (il embro) Grillo, le masque du vide

La crise politique en Italie a un caractère local très marqué. Depuis la fin de la partitocratie absolue à la suite de l’opération mani pulite, les Italiens n’ont jamais réussi à trouver le juste modus vivendi pour l’organisation de leur vie politique. En Italie, comme en France du reste, le contrat né des conditions brinquebalantes de l’Après-Guerre est mort mais nul substitut ne s’impose. La réforme institutionnelle partielle, en donnant par exemple une prime au vainqueur des élections à la Chambre, n’a stabilisé qu’à la marge le système politique qui semble aujourd’hui à nouveau paralysé. De fait, comme souvent, la solution politique ne se trouvera pas dans les arguties juridiques mais bel et bien dans la recherche d’un consensus, non seulement au sein des partis, mais surtout de la population.
Or, force est de constater que l’Italie connaît une crise morale forte, sur fond de corruption, de partis discrédités et de profondes césures dans le pays à l’image des relations jamais simples, malgré l’échec de la Lega Nord de Umberto Bossi, entre le Nord, prospère, et le Mezzogiorno moins industrieux. Par ailleurs, le cas Berlusconi est une énigme pour tous les partenaires de la Péninsule : comment ce vieux marlou qui a exercé le pouvoir à plusieurs reprises depuis 1994 et qui a laissé le pays exsangue voilà seulement 15 mois, peut-il encore séduire un électorat de centre droit qui disposait pourtant d’une alternative crédible, sérieuse oserait-on, en la personne de Mario Monti ? Quelle que soit la réponse, il faut bien constater que l’argument moral vaut non seulement pour le vieux capo mais aussi pour certains de ses électeurs.
Toutefois, ce serait une erreur de considérer que la crise est purement de nature italienne. Les commentateurs ont souligné le risque pour les économies de la zone euro mais, au-delà de la menace systémique, l’imbroglio italien nous renvoie à nos propres turpitudes. L’offre proposée aux Italiens était pathétique : un bouffon, un corrompu, un apparatchik et un technocrate. Certes, on objectera que le choix démocratique consiste bien souvent à exclure plutôt qu’à adhérer. Mais n’est-on pas précisément au bout de ce système, n’est-ce pas l’expression d’une profonde lassitude ?
Partout en Europe, Mariano Rajoy, Elio di Rupo, David Cameron, ou encore François Hollande en sont les expressions éclatantes ; on vote par dépit, pour sanctionner négativement. Or, dans une période de mutation comme la nôtre, les électeurs ont besoin de visibilité et les partis traditionnels ne sont pas parvenus à éclairer quoi que ce soit, tout occupés à leurs propres luttes de pouvoir intestines. Dans ce contexte, les formations contestataires récoltent une prime aussi stérile que trompeuse : ici la palabre gouleyante d’un Bepe Grillo, là la gouaille revêche un Jean-Luc Mélenchon. Le succès de ces plébéiens, ou prétendus tels puisqu’ils ont, souvent, en commun de jouir d’une fortune pour régaler les masses (tel Jörg Haider ou évidemment Bepe Grillo grâce aux subsides de la télévision publique) ou de se réfugier bien au chaud dans les institutions, tel Jean-Luc Mélenchon se faisant élire (indirectement) au Sénat dès l’âge minimal légal à l’époque, volontiers sophistes et démagogues, est l’expression du vide politique européen. La crise économique a bon dos, c’est aussi l’incapacité des leaders à dessiner une ligne d’horizon qui accentue le sentiment croissant de désœuvrement.
Gardons-nous donc de considérer la situation italienne comme spécifique. Les difficultés de Rome sont un révélateur de notre propre malaise. Le vote défouloir prospère sur la désespérance et l’Europe, cible commune des anti-système, est clairement menacée par cette évolution de l’expression électorale. Or, il n’est pas suffisant de fustiger l’irresponsabilité et les mensonges de ceux qui assènent sans proposer concrètement. Le chemin de la raison n’est pas celui du fatalisme. En dehors d’un seul bilan comptable sur la situation financière, privée et publique, en Europe, une ligne politique est possible. Elle implique de renverser la méthode traditionnelle, soit partir du national et de concilier les intérêts au niveau de l’Union. Cette approche, c’est celle qui a conduit Mario Monti à être considéré, dans une partie du centre droit ralliée à Silvio Berlusconi, comme le missi dominici d’Angela Merkel et non de l’intérêt national italien bien compris dans un ensemble européen intégré et assumé. La démarche est difficile mais l’objectif est clair : il faut, en amont, créer les conditions d’un consensus politique au niveau européen. Ceci est de la responsabilité des partis politiques, à commencer par leur organisation au sein et en dehors du Parlement européen, lesquels seront justement les premiers sacrifiés s’ils ne renouvellent pas leur offre. A problèmes européens, euro ou non puisque nul ne peut douter du niveau d’imbrication de nos économies, solutions européennes. La nature a horreur du vide, dit-on, aussi combien de Bepe Grillo, et pour quelles conséquences avant que le message lancé par les électeurs ne soit enfin compris ?
JC

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La crise politique en Italie a un caractère local très marqué. Depuis la fin de la partitocratie absolue à la suite de l’opération mani pulite, les Italiens n’ont jamais réussi à trouver le juste modus vivendi pour l’organisation de leur vie politique. En Italie, comme en France du reste, le contrat né des conditions brinquebalantes de l’Après-Guerre est mort mais nul substitut ne s’impose. La réforme institutionnelle partielle, en donnant par exemple une prime au vainqueur des élections à la Chambre, n’a stabilisé qu’à la marge le système politique qui semble aujourd’hui à nouveau paralysé. De fait, comme souvent, la solution politique ne se trouvera pas dans les arguties juridiques mais bel et bien dans la recherche d’un consensus, non seulement au sein des partis, mais surtout de la population.

Or, force est de constater que l’Italie connaît une crise morale forte, sur fond de corruption, de partis discrédités et de profondes césures dans le pays à l’image des relations jamais simples, malgré l’échec de la Lega Nord de Umberto Bossi, entre le Nord, prospère, et le Mezzogiorno moins industrieux. Par ailleurs, le cas Berlusconi est une énigme pour tous les partenaires de la Péninsule : comment ce vieux marlou qui a exercé le pouvoir à plusieurs reprises depuis 1994 et qui a laissé le pays exsangue voilà seulement 15 mois, peut-il encore séduire un électorat de centre droit qui disposait pourtant d’une alternative crédible, sérieuse oserait-on, en la personne de Mario Monti ? Quelle que soit la réponse, il faut bien constater que l’argument moral vaut non seulement pour le vieux capo mais aussi pour certains de ses électeurs.

Toutefois, ce serait une erreur de considérer que la crise est purement de nature italienne. Les commentateurs ont souligné le risque pour les économies de la zone euro mais, au-delà de la menace systémique, l’imbroglio italien nous renvoie à nos propres turpitudes. L’offre proposée aux Italiens était pathétique : un bouffon, un corrompu, un apparatchik et un technocrate. Certes, on objectera que le choix démocratique consiste bien souvent à exclure plutôt qu’à adhérer. Mais n’est-on pas précisément au bout de ce système, n’est-ce pas l’expression d’une profonde lassitude ?

Partout en Europe, Mariano Rajoy, Elio di Rupo, David Cameron, ou encore François Hollande en sont les expressions éclatantes ; on vote par dépit, pour sanctionner négativement. Or, dans une période de mutation comme la nôtre, les électeurs ont besoin de visibilité et les partis traditionnels ne sont pas parvenus à éclairer quoi que ce soit, tout occupés à leurs propres luttes de pouvoir intestines. Dans ce contexte, les formations contestataires récoltent une prime aussi stérile que trompeuse : ici la palabre gouleyante d’un Bepe Grillo, là la gouaille revêche un Jean-Luc Mélenchon. Le succès de ces plébéiens, ou prétendus tels puisqu’ils ont, souvent, en commun de jouir d’une fortune pour régaler les masses (tel Jörg Haider ou évidemment Bepe Grillo grâce aux subsides de la télévision publique) ou de se réfugier bien au chaud dans les institutions, tel Jean-Luc Mélenchon se faisant élire (indirectement) au Sénat dès l’âge minimal légal à l’époque, volontiers sophistes et démagogues, est l’expression du vide politique européen. La crise économique a bon dos, c’est aussi l’incapacité des leaders à dessiner une ligne d’horizon qui accentue le sentiment croissant de désœuvrement.

Gardons-nous donc de considérer la situation italienne comme spécifique. Les difficultés de Rome sont un révélateur de notre propre malaise. Le vote défouloir prospère sur la désespérance et l’Europe, cible commune des anti-système, est clairement menacée par cette évolution de l’expression électorale. Or, il n’est pas suffisant de fustiger l’irresponsabilité et les mensonges de ceux qui assènent sans proposer concrètement. Le chemin de la raison n’est pas celui du fatalisme. En dehors d’un seul bilan comptable sur la situation financière, privée et publique, en Europe, une ligne politique est possible. Elle implique de renverser la méthode traditionnelle, soit partir du national et de concilier les intérêts au niveau de l’Union. Cette approche, c’est celle qui a conduit Mario Monti à être considéré, dans une partie du centre droit ralliée à Silvio Berlusconi, comme le missi dominici d’Angela Merkel et non de l’intérêt national italien bien compris dans un ensemble européen intégré et assumé. La démarche est difficile mais l’objectif est clair : il faut, en amont, créer les conditions d’un consensus politique au niveau européen. Ceci est de la responsabilité des partis politiques, à commencer par leur organisation au sein et en dehors du Parlement européen, lesquels seront justement les premiers sacrifiés s’ils ne renouvellent pas leur offre. A problèmes européens, euro ou non puisque nul ne peut douter du niveau d’imbrication de nos économies, solutions européennes. La nature a horreur du vide, dit-on, aussi combien de Bepe Grillo, et pour quelles conséquences avant que le message lancé par les électeurs ne soit enfin compris ?

JC