Le Luxembourg, un laboratoire européen

LOGO_PRESIDENCE_2015_RGB_FRL’Atelier Europe a arpenté le Grand-Duché durant deux jours. A la veille d’un Conseil ECOFIN et à mi-parcours de la Présidence luxembourgeoise de l’UE, nous avons été cordialement reçus par des juristes, des diplomates, des parlementaires et des fonctionnaires européens, pour une série d’entretiens entre actualité brulante et priorités de long terme. Voici, en trois épisodes, le compte-rendu de ces rencontres sur le Luxembourg, la finance et les institutions européennes.

 

Le Luxembourg, petit pays et Grand-Duché

Comment un petit territoire, ancien « Département des forêts » sous Napoléon, a-t-il su tirer parti des contraintes de son histoire et de sa géographie pour devenir une place financière de premier plan et un pays cofondateur des Communautés européennes? Voyager au Luxembourg, c’est se poser inévitablement cette question, qui n’est autre que celle des avantages comparatifs, chère à l’économiste Ricardo. Voyager au Luxembourg, c’est également interroger la diversification, cet art de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier économique, qu’il s’agisse d’industrie, de finance ou de services. Pays ouvert sur l’extérieur, le Luxembourg s’avère en fait un laboratoire de l’Europe. La Monarchie constitutionnelle y accueille depuis leur fondation des institutions clés, de la CECA de jadis à la Cour de Justice, en passant par la Cour des comptes. Au croisement de plusieurs identités culturelles, le Luxembourg fait bien souvent figure de point d’équilibre dans l’intérêt général communautaire.

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Voyage d’étude à Luxembourg [MàJ]

LOGO_PRESIDENCE_2015_RGB_FRL’Atelier Europe se rend au Luxembourg du 1er au 4 octobre à l’occasion de la Présidence luxembourgeoise du Conseil. Il s’agit du 14e séjour d’étude (débuté en 2009 à Prague) et il permettra à notre délégation de rencontrer des acteurs locaux (politiques, journalistes et hauts fonctionnaires) ainsi qu’européens (BEI, Cour des Comptes et Cour de Justice).

Un compte-rendu de synthèse sera publié dans la foulée.

Et, tout au long du séjour, suivez nos pérégrinations sur les réseaux sociaux: Facebook, Twitter, Instagram !

Mise à jour: L’Atelier a rencontré:

Ministère des Affaires étrangères
Gaston Stronck, Ambassadeur, Directeur des Relations économiques internationales et des Affaires européennes

Ministère des Finances
Isabelle Goubin, Directrice du Trésor

Chambre des Députés
Marc Angel, Président de la Commission des Affaires étrangères

Ambassade de France
Guy Yelda, Ambassadeur

Banque Européenne d’Investissement
Ambroise Fayolle, Vice-Président

Cour des Comptes
Christophe Lesauvage, Chef du Service juridique

Luxembourg for Finance
Nicolas Mackel, CEO

Cour de Justice de l’UE
Eric Vanham, Référendaire

Wort (journal)
Jean-Lou Siweck, Rédacteur en chef
skyline

Riga ou la détente russe

Après la Lituanie, la Lettonie est le deuxième pays balte à prendre la Présidence tournante du Conseil de l’Union européenne. Pour ce « petit » pays de 2,2 millions d’habitants, entré l’année dernière dans la zone euro, cette Présidence est aussi l’occasion de se faire mieux connaître sur la scène européenne. Logo Lettonie 2015Depuis son indépendance en 1991, la Lettonie est passée par toutes les phases économiques: reconstruction, libéralisation, boom (avec des taux de croissance supérieurs à 10 % dans les années 2000), dépression et rigueur. Aujourd’hui, dans une Europe toujours malade de son chômage de masse et de sa croissance poussive, le pays arbore fièrement ses 4 % de croissance. Riga, surprenante par son architecture, est une ville dynamique qui a plutôt bien digéré son passé soviétique dans l’expression de son bâti, sans en oublier son imposante et difficile histoire, comme en témoignent le musée des Occupations ou l’ancien siège du KGB. La métropole germano-balte retrouve depuis son indépendance un peu de son atmosphère et de son style d’avant-guerre. Riga fut la principale ville de l’espace baltique oriental, intégré au cours du 18è siècle à l’empire des Tsars. C’est dans cette ville qui abrite le plus grand nombre de bâtiments de style Art Nouveau d’Europe (plus de 800), dont les façades typiques ont été classées en 1997 par l’UNESCO au patrimoine mondial de l’humanité, que l’Atelier Europe a séjourné pour ce 13è voyage d’études.

Le souffle de l’esprit marchand de la Hanse comme régulateur de la crise

Riga était devenue au 19è siècle une métropole industrielle d’avant-garde et un grand port qui rivalisait avec Odessa. Encore aujourd’hui le port paraît presque trop grand dans un pays trop petit. Telle Vienne l’impériale dans ses frontières étriquées. Riga a contribué à véhiculer en Russie cet esprit marchand typique des villes de la ligue hanséatique, ainsi que les idées de progrès social et de libéralisme économique. C’est encore sur ce créneau-là que cette étonnante capitale balte se positionne. Rappelons que Laimdota Straujumala Première ministre lettone, vice-présidente de la Commission européenne, est chargée de l’Euro et du Dialogue social. « Une Europe compétitive, une Europe numérique, une Europe engagée« : voilà le slogan de la Présidence lettone, en ligne avec la priorité donnée par la Commission au Marché unique du numérique. Sur le volet compétitivité, la Lettonie est crédible et peut se vanter de sa propre expérience. Ses politiques de réformes structurelles et d’investissement mises en place pour stimuler l’emploi ont donné de bons résultats. La rapidité de la reprise économique a contrasté avec la violence de l’effondrement en 2008, période pendant laquelle le chômage des hommes est passé brutalement de 6 à 25 % (notamment en raison de leur forte représentation dans le secteur de construction qui s’est arrêté net). Autre conséquence iconoclaste de cette crise: la Lettonie, bien que ne produisant pas de voitures, est devenue brièvement exportatrice d’automobiles. Il fallait bien écouler les stocks des invendus et des saisies. Le pays est encore à 6 points de son niveau d’avant la crise, mais la Lettonie fait figure aujourd’hui de « bon élève » de l’Europe avec un taux de croissance de 4 %, un déficit public faible de 1,3 % du PIB et une dette publique d’environ 38 % du PIB en 2014. Mais pour en arriver là, il a fallu passer par de douloureux sacrifices et la consolidation a été brutale (en terme de baisse des dépenses publiques notamment, le RMI local s’élevant à 60 euros, la baisse de revenus pour les salariés pouvant aller jusqu’à 80 %, etc.) pour une population qui est restée malgré tout stoïque. Cette acceptation sociale et cette forte résilience ont permis la reconduction du gouvernement meneur de réformes, et ainsi la mise en place de politiques sur le long terme. La dévaluation de la monnaie locale, le lats, a été d’emblée écartée (toucher à la monnaie aurait envoyé un mauvais signal avant l’entrée dans l’euro), pour se concentrer sur la compétitivité. La thérapie de choc a montré la grande flexibilité de l’économie lettone, qui s’est réorientée vers les exportations, agricoles notamment. Dans son agenda européen, la Lettonie mise aussi beaucoup sur le numérique comme moteur de croissance durable.

Stoïcisme face aux réformes pour certains, mais pour d’autres, la non-acceptation sociale de la rigueur, ou tout simplement l’impossibilité de trouver un travail décemment rémunéré, les a conduit à l’émigration. Environ 10 % des Lettons ont émigré au moment de cette crise, notamment en Grande-Bretagne et au Canada, et cette fuite des cerveaux et de la main d’œuvre pose un problème persistant au pays.
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Voyage d’études à Riga

Logo Lettonie 2015L’Atelier Europe se rendra en voyage d’études à Riga du 22 au 26 avril, à l’occasion de la Présidence lettone du Conseil de l’UE. Ce déplacement s’inscrit dans la continuité d’une tournée des capitales européennes initiée lors de la présidence tchèque, et qui a perduré depuis.

L’Atelier Europe effectuera son treizième voyage d’études !

Ces déplacements sont l’occasion de rencontrer les gouvernements, acteurs institutionnels et de la société civile (personnalités académiques, journalistes etc…), et nous permettent de mieux comprendre les priorités de chaque présidence, leur mise en œuvre et la carte mentale de l’Europe de nos partenaires.

Programme des rencontres :

Andris Piebalgs
Conseiller affaires européennes et économiques auprès du Président de la République
Ancien Commissaire européen à l’énergie puis au développement

Janis Sārts
Secrétaire d’Etat
Ministère de la défense

Artis Pabriks
Député européen (PPE)
Ancien ministre des affaires étrangères & de la défense

Atis Lejiņš
Député du parti Unity (libéral-conservateur)
Fondateur du Latvian Institute of International Affairs

Deborah Miller
Conseillère aux affaires politiques et stratégiques
Ambassade des États-Unis en Lettonie

Miroslav Mitrofanov
Co-Président de la Latvian Russian Union
Vice-Président de la EU Russian-speakers Alliance

Morten Hansen
Professeur d’économie à la Stockholm School of Economics in Riga (SSE Riga)

Retrouvez prochainement le compte-rendu du voyage d’études sur notre site, et suivez-nous in situ avec Facebook & Twitter.

L’Italie de Renzi: un nouveau récit européen?

Une présidence dans un contexte politique de rupture

Il y a eu l’Allemagne de Schröder et ses réformes. Il y a maintenant l’Italie de Renzi qui bouscule les codes et les normes de la politique italienne, pour faire de son pays l’un des plus réformateurs du moment. Ou qui se proclame comme tel. Pour l’heure, Renzi est celui qui a permis un renouvellement de la classe politique italienne, on en rêverait en France, et il a clos le chapitre de l’hystérie berlusconienne. Longtemps, l’Italie fut regardée comme une sorte de gérontocratie et Renzi peut être compris comme le fruit d’une certaine exaspération générationnelle. La jeunesse italienne subit au premier chef les conséquences d’une crise interminable et dont les origines la précèdent largement. Renzi, c’est un homme de 39 ans (plus jeune chef de gouvernement en Europe après Charles Michel en Belgique) qui fait front aux constitutionnalistes et aux syndicats hostiles au « Jobs act », l’une de ses réformes phares qui a pourtant provoqué un schisme au sein du son parti, le Parti Démocrate. Renzi, c’est l’histoire d’un homme légitimé par les élections européennes (40% des suffrages), qui trace sa route presque seul, et que certains comparent déjà à Thatcher. Bye bye donc l’Italie de cet histrion de Berlusconi, qui a dominé pendant 20 ans la politique italienne et qui fut le symbole d’une Italie amorale et illégale, et dont beaucoup d’Italiens avaient honte à l’étranger. C’est dans cette Italie fière d’elle-même, dans laquelle indéniablement souffle un vent nouveau, que nous avons séjourné pour ce 12è voyage de Présidence européenne.

Logo de la Présidence italienne

Comme toujours, l’agenda de cette Présidence est dicté par les circonstances internationales et les priorités de politique intérieure. Or, partout en Europe, le diagnostic de l’exigence des réformes structurelles a été fait, notamment sur le marché du travail, la Justice et l’administration publique. Emploi (ici aussi on parle de « lost generation », le taux de chômage général est de 12% en Italie mais grimpe à 42 % chez les jeunes), présence forte sur la scène internationale, climat, questions migratoires (Frontex et la suite de l’opération Mare Nostrum (lancée après le drame des migrants de Lampedusa) avec Triton, révision des accords de Dublin) et fonctionnement institutionnel (une nouvelle version de la vieille antienne du rapprochement de l’UE et des citoyens, mais cette fois-ci à partir des citoyens eux-mêmes, avec une approche « bottom-up » et « grass-rooted » selon les expressions anglaises en cour), sont les cinq priorités de cette Présidence italienne.

En parallèle de ces réformes structurelles, qu’elle souhaite continuer de promouvoir, la Présidence italienne soutient également une politique de relance coordonnée au niveau européen, avec notamment des investissements par le biais de la Banque Européenne d’Investissement (BEI) et le plan Juncker d’une enveloppe de 300 milliards d’Euros. Finalement, cette vision sied au vieil adage de Jacques Delors: « la rigueur aux États, la relance à l’Europe ». Au-delà de ces ajustements macro-économiques, la question du fonctionnement même des institutions est à l’ordre du jour de cette Présidence italienne. Elle souhaite renforcer le délicat processus de monitoring des réformes accomplies par les pays membres et prévoir, en cas de non-respect des règles communautaires, une grille de sanctions qui pourraient aller, pour les plus mauvais élèves, jusqu’à la mise sous tutelle. Toutefois, les Italiens sont favorables à une flexibilité accrue dont les États pourraient jouir par rapport au Pacte de stabilité et de croissance, négocié à la fin des années 90 dans un contexte économique mondial très différent de celui d’aujourd’hui. Quelles pourraient donc être les marges de manœuvre? Renzi est resté plutôt vague sur ce sujet (il ne faut pas trop irriter l’Allemagne) et la Présidence italienne laisse la Commission négocier en bilatéral avec les États membres.

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