Présidence polonaise – Entre romantisme et pragmatisme, un discours européen convaincu

Varsovie. Après Prague et Budapest, une nouvelle fois l’Atelier Europe a migré à l’Est, dans ce pays qui tient sa présidence de l’UE pour la première fois depuis son intégration à l’Union. Une occasion pour le pays de montrer sa bonne volonté européenne, après quelques années au cours desquelles les Polonais ont pu apparaître comme les « empêcheurs de tourner en rond » de l’UE.

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Varsovie. Après Prague et Budapest, une nouvelle fois l’Atelier Europe a migré à l’Est, dans ce pays qui tient sa présidence de l’UE pour la première fois depuis son intégration à l’Union. Une occasion pour le pays de montrer sa bonne volonté européenne, après quelques années au cours desquelles les Polonais ont pu apparaître comme les « empêcheurs de tourner en rond » de l’UE.

 

Dans cette grande capitale d’Europe centrale, au charme indiscutable, on y ressent beaucoup le poids de l’Histoire, même si la ville a été completement rasée pendant la Seconde Guerre mondiale. Les Polonais vivent encore beaucoup dans le passé, même si depuis deux législatures, les mentalités commencent à changer. Se promener dans Varsovie, c’est voir ressurgir à chaque coin de rue l’Histoire européenne. L’Humeur est au drapeau bleu étoilé et à la mondialisation (bien que contrairement à certaines de ses consœurs de la région, Varsovie ne soit pas totalement défigurée par les affiches publicitaires), Varsovie est une ville de son temps, célébrant à la fois sa culture, ses traditions propres mais aussi l’ouverture. L’ambiance particulière des cafés très « viennois », à l‘image du Café Wedel, nous rappelle que nous sommes ici dans un espace géographique particulier, celui de l’Europe centrale. Si la carte mentale que nous renvoie la Pologne a changé depuis la fin du communisme et son intégration dans l’Europe, il n’en reste pas moins que sa situation géographique, coincée entre l’Allemagne et la Russie, demeure un invariant géopolitique qui conditionne encore beaucoup, quoique nos interlocuteurs polonais nous en ont dit, la politique européenne du pays.

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Voyage d’études à Varsovie

Logo-presidence-pologne-UE-2011À l’occasion de la Présidence polonaise du Conseil de l’Union européenne, l’Atelier Europe, dans la continuité des déplacements à Prague, Stockholm, Madrid, Bruxelles et Budapest, se rendra à Varsovie du 19 au 23 octobre 2011, pour un voyage d’études, de dialogues et d’échanges sur les priorités et les enjeux de cette Présidence de l’UE.

Programme des rencontres :

Cabinet du Premier Ministre
Jan Hofmokl, conseiller spécial auprès du Premier Ministre pour la Présidence polonaise

Ministère de la Défense
Zbigniew Włosowicz, secrétaire d’État à la politique de Défense

Ministère des Affaires étrangères
Michal Mottl, conseiller ECOFIN du Ministre des affaires étrangères
Alexandre Rogalski, conseiller auprès du Secrétaire d’État aux Affaires européennes
Joanna Ołdakowska-Kwiatek, Directrice du département de la Stratégie
Jarosław Dziedzic, Directeur du département Partenariat oriental
Anna Kozłowska, Partenariat oriental / Belarus
Daniel Słupek, Partenariat oriental / Arménie & Azerbaïdjan

Ambassade de France
Éric André Martin, Premier Conseiller
Jean-Christophe Thiabaud, Conseiller de presse
Patrick Pillon, Service Économique

[MàJ] Le compte rendu est en ligne.

Arnaud Montebourg ou l’ineptie du protectionnisme européen

Bataille-navale2Dans sa lettre à Martine Aubry et François Hollande, Arnaud Montebourg prêche pour un "protectionnisme européen, social et écologique". Il faut reconnaître aux deux destinataires le courage d’avoir su botter en touche dans leurs réponses et de ne pas avoir repris à leur compte la revendication de "démondialisation".

"Démondialiser", comme le suggère Arnaud Montebourg, entraînerait des conséquences dramatiques tant pour l’industrie française, laquelle dépend largement des exportations, et a besoin de produits importés que la France ne sait pas ou ne peux pas produire, et de ce fait pour les salariés français également, que pour les ménages, lesquels seraient confrontés à une flambée du prix des produits importés (carburant, textiles, électronique…).

L’Atelier Europe a déjà démontré la vanité d’une telle politique, et souhaiterait simplement montrer ici à quelle point les propositions d’Arnaud Montebourg participent d’un mensonge électoraliste qui entretient le déni de réalité d’une partie des Socialistes à l’égard de l’Europe. Arnaud Montebourg invoque un protectionnisme "européen" (sans doute en partie pour éviter de voir sa thèse trop rapidement rapprochée de celle du Front National): il affirme ainsi qu’ "éclairés" par la position française, les autres pays européens suivront et se rallieront à cette thèse.

Arnaud Montebourg se place ici dans la droite ligne de Laurent Fabius, lorsque ce dernier réclamait en 2005 un traité "plus social". Il savait pertinemment que personne n’en voulait en Europe, ni évidemment les Anglais (opposés à un droit du travail trop contraignants), mais également ni les Scandinaves (attachés à un modèle protecteur dont ils ne souhaitaient pas débattre à Bruxelles), ni les nouveaux entrants (qui attirent des investissements et croissent grâce à la flexibilité de leur modèle). Pourtant, Monsieur Fabius a affirmé qu’il était possible d’harmoniser les politiques sociales européennes, d’avoir un SMIC européen, des législations communes, etc., comme si la France allait réussir à imposer aux autres la rigidité de son modèle plutôt que de se réformer. Monsieur Fabius connaissait la réalité, mais il l’a masquée à ses électeurs.

Monsieur Montebourg se pose en digne héritier de cette méthode (est-ce là une énième résurgence du dogme mitterrandien du PS pris sur sa gauche?). Car il faut le dire et le répéter: jamais les autres pays de l’UE ne voudront adopter de barrières protectionnistes telles qu’il les propose: l’Allemagne croît grâce à ses exportations, comme les pays scandinaves, tandis que les Anglais ou les Néerlandais sont viscéralement attachés au libre-échange, qui assure leur fortune depuis des siècles. Les pays latins sont peut-être moins enthousiastes à l’égard de la mondialisation, mais ils savent pertinemment qu’il s’agit d’une évolution irréversible: il suffit de constater que les dirigeants socialistes de ces pays (Zapatero, Prodi il y a quelques années) ont toujours été plus proches du modèle "blairiste" que des socialistes français (ces derniers se gaussent en général quand on évoque Tony Blair, mais ils gagneraient sans doute à tirer les leçons de leur isolement sur la scène socialiste européenne). Bref, là où les Britanniques se placent à un extrême du spectre libre échangiste, la France se trouve elle aussi isolée mais à un autre extrême, protectionniste. Malheureusement, les Français ne semblent pas en avoir conscience ce qui laisse libre cours aux spéculations électoralistes.

Dès lors, et Monsieur Montebourg le sait bien, même s’il refuse de l’avouer, la démondialisation devra se faire à l’échelle nationale, puisqu’elle ne se fera pas à l’échelle européenne. Est-ce faisable, alors que la France est dans le marché unique? La réponse est non, puisque la libre circulation des biens impose qu’une fois rentré dans l’UE (que ce soit à la frontière portugaise ou finlandaise), un produit y circule librement. Pour imposer de nouvelles taxes aux produits chinois, il faudra donc les imposer à la frontière française, et donc sortir du marché commun. Or ce dernier est le socle de l’UE: il faudra donc en sortir également (avec un effet dramatique sur nos exportations et nos importations, réseaux de transports, politique de concurrence, d’innovation, agricole, de développement…), abandonner l’euro (et donc faire le choix de l’inflation et de l’instabilité), et in fine se résoudre à devenir un petit pays en déclin et en repli.

Arnaud Montebourg n’a pas eu le courage d’aller au bout de son raisonnement, et en cela, s’est rendu coupable d’entretenir l’idée d’un socialisme français phare de l’Europe, illusion dans laquelle s’enferme une partie des socialistes français. La France, comme toute démocratie, a besoin d’une opposition crédible et mérite donc mieux que cela. Souhaitons donc que le lauréat de la primaire du PS, Monsieur Hollande, se garde d'emprunter les chemins obscurs proposés par Monsieur Montebourg en matière économique.

 

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Le Front National et la voie du déclin

EuroLe Front National a fait de la sortie de l’euro l’un de ses chevaux de bataille dans la campagne pour l’élection présidentielle de 2012. Il a notamment publié un plan de sortie de l’euro, qui s’accompagnerait d’une dévaluation pour relancer l’économie française.

L’Atelier Europe a déjà démontré l’ineptie des scénarios de retour au Franc, l’inflation et l’instabilité qu’ils entraîneraient, affectant durement et durablement les entreprises comme les ménages, à court comme à long terme.

Nous souhaitons simplement ici rappeler ce qui pourrait être une évidence, à savoir que la dévaluation est le choix des faibles, de ceux qui ont capitulé car ils ne pensent plus être capables de produire mieux, donc font le choix de produire moins cher via une monnaie dévaluée.

Certes, la dévaluation peut apporter une « bouffée d’air » à court terme , mais elle n’enrichit pas le pays qui la pratique (il vend plus au début – mais se fait payer dans une monnaie qui vaut moins – et son chômage baisse transitoirement – jusqu’à ce que les salariés se rendent compte qu’ils sont en fait moins payés en termes réels puisque l’inflation importée érode leur pouvoir d’achat)

D’autre part elle le détourne des vrais enjeux, ceux de la compétitivité, telle qu’elle s’acquiert par l’innovation, les investissements dans la recherche et le développement, mais aussi le capital humain via la formation initiale et professionnelle… En résumé, tout ce qui permet à un pays de fabriquer de meilleurs produits et de fournir de meilleurs services, tout ce qui lui permet de devenir de plus en plus « price maker » (c'est-à-dire d’imposer ses prix sur les marchés internationaux car ses produits se distinguent suffisamment de la concurrence et sont peu sensibles au prix) et de moins en moins « price taker » (c'est-à-dire d’être obliger de mener une concurrence par les prix quand d’autres (et trop de) pays sont capables de proposer les mêmes produits). 

La dévaluation proposée par le Front National n’apporte rien de tout cela : elle utilise au contraire l’euro comme bouc émissaire pour éviter de poser les bonnes questions, auxquelles le FN semble bien incapable de répondre.

La France doit donc choisir entre la facilité et l’illusion du court terme qu’apporte la dévaluation compétitive, et la compétitivité à long terme, qui seule peut enrichir un pays et faire durablement croître la qualité de vie et le pouvoir d’achat de ses citoyens. C’est un choix difficile pour un homme ou une femme politique, car il faut convaincre les électeurs que la croissance durable passe par la rigueur à court terme, l’adoption de réformes qui obligent à certains coûts de transition. Peut-être cela distingue-t-il les hommes d’Etat des politiciens : le Front National et ses leaders ont tranché une fois de plus.

 

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Arnaud Montebourg a dit « les délocalisations détruisent des emplois en France et en Europe », c’est FAUX!

UsineDans un entretien récent avec Alain Minc, le héraut de la démondialisation, Arnaud Montebourg déclarait "la direction générale du Trésor a estimé que 740.000 emplois ont été perdus en dix ans à cause des délocalisations. De son côté; l’économiste Patrick Artus chiffre à 8% l’emploi industriel européen détruit depuis 1995". Ce que dit Arnaud Montebourg est imprécis et faux.

La Direction Générale du Trésor (DGTPE) a en effet publié en 2010 une étude sur le phénomène de désindustrialisation, et la baisse de l’emploi industriel en France (qui passe de 5,3 à 3,4 millions de salariés entre 1980 et 2007 (La désindustrialisation en France, Document de travail de la DGTPE, 2010, Lilas Demmou). Mais elle n’attribue nullement cette évolution aux délocalisations! Suivant le Trésor, trois facteurs explicatifs prédominent: l’externalisation de certains processus (comptabilité par exemple) qui ont pour effet de les affecter au secteur des services; les gains de productivité (on produit plus avec moins d’emploi) et, dans une proportion minoritaire, la concurrence internationale, qui ne doit pas être confondue avec les délocalisations (on achète Mazda et non plus Renault, mais cela ne signifie pas que Renault a quitté la France, simplement que sa compétitivité relative a diminué). Les chiffres d’Artus sont ainsi exacts mais Arnaud Montebourg établit un lien de causalité qui n’a pas lieu d’être.

En revanche, les études qui portent précisément sur les délocalisations concluent à un impact bien moindre, au maximum d’une dizaine de milliers d’emplois par an (Désindustrialisation, Délocalisations, Conseil d’Analyse Economique, Fontagné, Lorenzi, 2005 ).

Arnaud Montebourg agite donc à dessein le spectre des délocalisations, phénomène marginal, dont l’interdiction aurait pour seul effet de faire fuir les investissements du territoire français. Il entretient les peurs des électeurs en invoquant des références tronquées. Il fait appel aux vieilles ficelles de la désinformation, et ce au seul soutien de sa thèse, aussi fumeuse que politiquement lucrative, de la "démondialisation".

 

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