Accord de libre –échange UE –États-Unis : le baiser de la mort ou l’Occident triomphant ?

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José Manuel Durao Barroso vient de lancer un pavé dans la marre, en mettant à l’ordre du jour de la Commission la négociation d’un accord de libre-échange avec les États-Unis, qui permettrait de créer un grand marché intérieur transatlantique pour les biens et les services. Cet accord a longtemps été voulu par plusieurs États européens, mais les États-Unis s’étaient montrés jusqu’ici plus réservés, tradition protectionniste oblige. La crise économique obligeant les uns et les autres à reconsidérer son prisme commercial, le sujet est donc à nouveau sur la table.

L’enjeu d’un tel accord ne se situe pas au niveau des droits de douane qui sont déjà très faibles entre les deux principales entités commerciales du monde (aux alentours de 4 %, excepté quelques secteurs particuliers comme le textile ou l’agriculture). Le cœur de la négociation concerne les obstacles non tarifaires, en l’occurrence les normes. Or ces dernières représentent un puissant vecteur de puissance et un outil d’affirmation de ses valeurs. Réfléchir à de nouvelles normes qui régiront le commerce transatlantique, du fait du poids économique de cet espace, c’est clairement définir le type de capitalisme qui donnera le ton au reste du monde.

Bien entendu, l’idée est aussi de renforcer la croissance après le choc de la crise financière de 2008. Mais derrière ces considérations commerciales, cette volonté d’accord illustre surtout la prise de conscience de part et d’autre de l’atlantique des nouveaux paramètres géopolitiques du XXIè siècle, parfaitement décrits par Fareed Zakaria sous le vocable de « The rise of the rest », dans un livre qui analyse l’émergence des nouveaux compétiteurs asiatiques sur la scène mondiale et la rupture entre modernisation et occidentalisation. Dans cet ouvrage sur le monde post hégémonie américaine, Fareed Zakaria livre quelques idées afin que l’Amérique garde sa prééminence stratégique et évite une trop forte érosion de sa puissance économique. Pour cela, il préconise à l’Amérique de redéfinir ses priorités stratégiques (ceci a déjà été fait au début de la Présidence Obama en se tournant davantage vers l’Asie), de travailler en étroite collaboration avec ses alliés et de trouver avec eux un accord sur des règles internationales permettant cette interaction. La nouvelle volonté américaine de parvenir à cet accord commercial (depuis le discours d’Obama de février dernier sur l’état de l’Union) répond précisément à ces objectifs. L’objectif majeur des États-Unis est de mettre en place des normes qui devront s’imposer au reste du monde, notamment aux puissances émergentes, et particulièrement à la Chine.

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Livre Blanc Défense et Sécurité 2013: Publication de crise économique ou document d’orientation ?

As MEPs gather, 30 years of elections marked. 2009-07-13

La parution du « Livre Blanc Défense et Sécurité 2013 » dans un contexte de renouveau politique (un an après l’élection présidentielle) et de crise économique continue soulève naturellement la question de la finalité du texte, au-delà de celle affichée. Volonté de laisser une empreinte? Volonté de justifier de futures orientations budgétaires? Autant de motivations classiques et, peut-être, autant de fausses pistes. Non que ces motivations soient absentes, mais elles ne président pas au texte.

Premièrement, ce texte, contrairement à la perception que donne le gouvernement actuel sur de nombreux sujets, ne rompt pas avec « l’ère Sarkozy ». Bien au contraire. Le Livre Blanc de 2008 figure, dans le texte actuel, comme l’aune de référence – notamment en raison de l’introduction du concept de Sécurité Nationale, largement repris.

Secondement, l’actuel Livre Blanc introduit une continuité de publication. Décrit comme le premier Livre Blanc d’une publication désormais quinquennale, sa valeur tient plus au fait qu’il dresse un constat à un moment donné qu’à une vision stratégique appelée, par une grande pertinence, à résister au temps. Dans les faits, de part la référence au Livre Blanc de 2008 et part son année de publication, ce « premier » Livre Blanc assume parfaitement son rôle de « second ».

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Invitation – 24 mai 2013 – Conférence avec le Master Affaires européennes de Science Po

Dans le cadre de leur projet collectif, deux groupes d’étudiants du Master Affaires européennes de Sciences-Po, en partenariat avec l’Atelier Europe, ont le plaisir de vous convier à une conférence au cours de laquelle ils délivreront le fruit de leur travail et de leur réflexion.Celle-ci se tiendra le vendredi 24 mai 2012 à 18h30 dans les locaux de Sciences Po du 13 rue de l’Université (75007 – Paris), au sein de l’amphithéâtre Jean Moulin.

Dans un premier temps, un groupe d’étudiants présentera son étude intitulée « Des traditions politiques nationales au fédéralisme » puis le deuxième groupe d’étudiants vous dévoilera son documentaire audiovisuel sur « L’Europe et le monde: quelle politique étrangère pour l’Union européenne? ».

À la suite de la conférence vous pourrez échanger avec les étudiants ainsi qu’avec Thomas Mimra et Quentin Perret, les membres d’Atelier Europe ayant supervisé ces projets collectifs.

Vous pouvez télécharger l’invitation ici.

Pour vous inscrire, merci d’utiliser le formulaire ci-dessous :

Présentation des projets collectifs des étudiants du Master Affaires européennes de Sciences-Po (2013)

ont le plaisir de vous convier à la présentation de leurs travaux
réalisés dans le cadre de leur projet collectif,
en partenariat avec l’Atelier Europe,
sur les thèmes suivants:
« Des traditions politiques nationales au fédéralisme »
Présentation d’une étude

« L’Europe et le monde: quelle politique étrangère pour l’Union européenne? »
Projection d’un documentaire audiovisuel

Vendredi 24 mai
18h30
Amphitéatre Jean Moulin

Inscription obligatoire
 

Irlande: austerity fatigue ou réveil du tigre celtique ?

1301-IrlandeNotre séjour a commencé par un détournement d’avion. En raison de vents violents, une partie de l’équipe a atterri à Glasgow et Manchester. « On the wrong Island » comme nous l’avons ironiquement précisé à nos premiers interlocuteurs, hilares de notre présentation de l’Ile britannique sous des auspices peu amènes. L’histoire souffle toujours dans le récit présent. Après quelques péripéties, et passées ces taquineries complices envers le « old foe » commun, nous voici donc, pour cette 9è visite de Présidence, au cœur du Tigre Celtique, dont la réussite fascinait tant avant la crise des subprimes. Cas d’étude intéressant donc que ce petit pays passé par tous les versants des montagnes russes de l’embellie économique des années 1990-2000 à la crise de la fin de années 2000. Avec l’ascension fulgurante de ce « PIIGS » puis sa chute, due notamment à une bulle immobilière créée par l’aubaine du crédit débridé et la flambée des prix de l’immobilier, et conduisant à l’escalade de la dette privée et l’érosion de la compétitivité, le défi à relever était colossal. Au moment où le débat sur les politiques d’austérité ronge l’Europe et où le doute s’immisce dans les gouvernements au pouvoir, le cas du redressement irlandais, cette nation de résistants qui a toujours su se réinventer, peut nous apporter certaines lumières. En tout état de cause, ici, il n’y a pas de débat sur l’austérité (car il y a toujours malgré tout du « stimulus money » comme nous l’avons entendu, avec notamment des aides européennes), l’austérité est donc plus une façon de gérer le budget qu’une théorie économique avec des politiques propres. Et elle est approuvée à plus de 60 % par des Irlandais décidemment très disciplinés.

01-DSC00973Cette Présidence, comme pour tous les pays en assumant la charge, est bien évidemment une dynamique très porteuse pour le pays. Tous les Irlandais sont unis pour faire de cette Présidence une réussite et l’utiliser à bon escient pour un sursaut national. Le retour aux affaires (européennes), en somme. Main dans la main, le secteur public travaille en cohésion parfaite avec le secteur privé, les think-tanks et autres fondations. Un bel exemple d’intérêt général bien compris. En France, on rêve souvent de cette méthode de travail, pour finalement revenir à des modes de fonctionnement très cloisonnés.

Pour comprendre l’attachement irlandais à l’Europe, il faut commencer par la géographie. Petit pays périphérique de l’UE de 4,6 millions d’habitants, l’Irlande ne peut exister dans une union qu’en créant des coalitions avec d’autres. « Mieux vaut se disputer que rester seul » est un vieux proverbe irlandais. Le pays a en outre encore besoin de la solidarité de ses partenaires pour alléger l’endettement et démontrer que les sacrifices consentis seront payés en retour. Partant de ce déterminisme géographique, où se situe Dublin entre Boston et sa fameuse diaspora et Bruxelles? L’Irlande est un pays très pro européen, et, il fut partie prenante dès la première heure de la zone euro. Le sentiment d’humiliation consécutif à la crise (« ce sont les banquiers français, autrichiens, etc., qui nous ont plantés ») tend à diminuer. 85 % des Irlandais souhaitent rester dans l’UE, et 73 % dans la zone euro. L’Irlande reste un bénéficiaire net (le pays a reçu 40 milliards d’euros depuis 1973). 45 % des Irlandais se définissent à la fois comme irlandais et européens. Ces chiffres montrent clairement une opinion publique sincèrement très favorable à l’Europe. L’europhobie britannique n’a donc pas contaminé son voisin irlandais. L’Irlande assume parfaitement un destin bien distinct de celui du Royame-Uni : en cas de future sortie du Royaume-Uni de l’UE, indiscutablement, l’Irlande ne quitterait pas l’Union.

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