Référendum en Grèce: l’Europe a-t-elle peur du peuple ?

L’épisode tragi comique du (non) référendum grec a une portée bien supérieure au simple baroud d’honneur d’un dirigeant aux abois. D’abord il marque les limites, comme cela fut tant de fois décrié dans ce blog, d’une méthode intergouvernementale aujourd’hui dépassée. L’euro, de nature communautaire et donc fédérale, ne saurait dépendre des aléas de politique intérieure de dix-sept Etats. Simple question de bon sens.

20.10.UE.Merkel.Sarkozy.Papandreou.930.620_scalewidth_300L’épisode tragi comique du (non) référendum grec a une portée bien supérieure au simple baroud d’honneur d’un dirigeant aux abois. D’abord il marque les limites, comme cela fut tant de fois décrié dans ce blog, d’une méthode intergouvernementale aujourd’hui dépassée. L’euro, de nature communautaire et donc fédérale, ne saurait dépendre des aléas de politique intérieure de dix-sept Etats. Simple question de bon sens. De même, la capacité régulatrice du couple/directoire franco allemand, du reste davantage loué à Paris qu’à Berlin, un peu comme la special relationship est vénérée à Londres mais ignorée à Washington, l’indifférence du fort au faible, sans doute, apparaît chaque jour plus insuffisante avec la répétition des crises. La dramaturgie du G20, façon Mère courage et Père fouettard, était sans conteste adaptée au décor cannois mais elle a envoyé au monde un signal désastreux sur la cacophonie européenne. Même le très prudent gouvernement japonais, à la suite des BRIC et des Etats-Unis, s’est fendu d’un communiqué appelant les Européens à oser l’unité avant d’espérer un quelconque soutien financier international. Pour l’heure, les Européens ont certes réalisé l’unanimité mais à l’extérieur et contre eux.

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Présidence polonaise – Rencontre avec Joanna Ołdakowska-Kwiatek, Directrice du département de la stratégie du Ministère des Affaires étrangères

Joanna Ołdakowska-Kwiatek, Directrice du département de la stratégie, ainsi que divers responsables du Ministère des Affaires étrangères, nous ont éclairés sur les grandes tendances en Pologne et sur les problématiques clés de la présidence.

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Joanna Ołdakowska-Kwiatek, Directrice du département de la stratégie, ainsi que divers responsables du Ministère des Affaires étrangères, nous ont éclairés sur les grandes tendances en Pologne et sur les problématiques clés de la présidence.

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Présidence polonaise – Entre romantisme et pragmatisme, un discours européen convaincu

Varsovie. Après Prague et Budapest, une nouvelle fois l’Atelier Europe a migré à l’Est, dans ce pays qui tient sa présidence de l’UE pour la première fois depuis son intégration à l’Union. Une occasion pour le pays de montrer sa bonne volonté européenne, après quelques années au cours desquelles les Polonais ont pu apparaître comme les « empêcheurs de tourner en rond » de l’UE.

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Varsovie. Après Prague et Budapest, une nouvelle fois l’Atelier Europe a migré à l’Est, dans ce pays qui tient sa présidence de l’UE pour la première fois depuis son intégration à l’Union. Une occasion pour le pays de montrer sa bonne volonté européenne, après quelques années au cours desquelles les Polonais ont pu apparaître comme les « empêcheurs de tourner en rond » de l’UE.

 

Dans cette grande capitale d’Europe centrale, au charme indiscutable, on y ressent beaucoup le poids de l’Histoire, même si la ville a été completement rasée pendant la Seconde Guerre mondiale. Les Polonais vivent encore beaucoup dans le passé, même si depuis deux législatures, les mentalités commencent à changer. Se promener dans Varsovie, c’est voir ressurgir à chaque coin de rue l’Histoire européenne. L’Humeur est au drapeau bleu étoilé et à la mondialisation (bien que contrairement à certaines de ses consœurs de la région, Varsovie ne soit pas totalement défigurée par les affiches publicitaires), Varsovie est une ville de son temps, célébrant à la fois sa culture, ses traditions propres mais aussi l’ouverture. L’ambiance particulière des cafés très « viennois », à l‘image du Café Wedel, nous rappelle que nous sommes ici dans un espace géographique particulier, celui de l’Europe centrale. Si la carte mentale que nous renvoie la Pologne a changé depuis la fin du communisme et son intégration dans l’Europe, il n’en reste pas moins que sa situation géographique, coincée entre l’Allemagne et la Russie, demeure un invariant géopolitique qui conditionne encore beaucoup, quoique nos interlocuteurs polonais nous en ont dit, la politique européenne du pays.

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Voyage d’études à Varsovie

Logo-presidence-pologne-UE-2011À l’occasion de la Présidence polonaise du Conseil de l’Union européenne, l’Atelier Europe, dans la continuité des déplacements à Prague, Stockholm, Madrid, Bruxelles et Budapest, se rendra à Varsovie du 19 au 23 octobre 2011, pour un voyage d’études, de dialogues et d’échanges sur les priorités et les enjeux de cette Présidence de l’UE.

Programme des rencontres :

Cabinet du Premier Ministre
Jan Hofmokl, conseiller spécial auprès du Premier Ministre pour la Présidence polonaise

Ministère de la Défense
Zbigniew Włosowicz, secrétaire d’État à la politique de Défense

Ministère des Affaires étrangères
Michal Mottl, conseiller ECOFIN du Ministre des affaires étrangères
Alexandre Rogalski, conseiller auprès du Secrétaire d’État aux Affaires européennes
Joanna Ołdakowska-Kwiatek, Directrice du département de la Stratégie
Jarosław Dziedzic, Directeur du département Partenariat oriental
Anna Kozłowska, Partenariat oriental / Belarus
Daniel Słupek, Partenariat oriental / Arménie & Azerbaïdjan

Ambassade de France
Éric André Martin, Premier Conseiller
Jean-Christophe Thiabaud, Conseiller de presse
Patrick Pillon, Service Économique

[MàJ] Le compte rendu est en ligne.

Arnaud Montebourg ou l’ineptie du protectionnisme européen

Bataille-navale2Dans sa lettre à Martine Aubry et François Hollande, Arnaud Montebourg prêche pour un "protectionnisme européen, social et écologique". Il faut reconnaître aux deux destinataires le courage d’avoir su botter en touche dans leurs réponses et de ne pas avoir repris à leur compte la revendication de "démondialisation".

"Démondialiser", comme le suggère Arnaud Montebourg, entraînerait des conséquences dramatiques tant pour l’industrie française, laquelle dépend largement des exportations, et a besoin de produits importés que la France ne sait pas ou ne peux pas produire, et de ce fait pour les salariés français également, que pour les ménages, lesquels seraient confrontés à une flambée du prix des produits importés (carburant, textiles, électronique…).

L’Atelier Europe a déjà démontré la vanité d’une telle politique, et souhaiterait simplement montrer ici à quelle point les propositions d’Arnaud Montebourg participent d’un mensonge électoraliste qui entretient le déni de réalité d’une partie des Socialistes à l’égard de l’Europe. Arnaud Montebourg invoque un protectionnisme "européen" (sans doute en partie pour éviter de voir sa thèse trop rapidement rapprochée de celle du Front National): il affirme ainsi qu’ "éclairés" par la position française, les autres pays européens suivront et se rallieront à cette thèse.

Arnaud Montebourg se place ici dans la droite ligne de Laurent Fabius, lorsque ce dernier réclamait en 2005 un traité "plus social". Il savait pertinemment que personne n’en voulait en Europe, ni évidemment les Anglais (opposés à un droit du travail trop contraignants), mais également ni les Scandinaves (attachés à un modèle protecteur dont ils ne souhaitaient pas débattre à Bruxelles), ni les nouveaux entrants (qui attirent des investissements et croissent grâce à la flexibilité de leur modèle). Pourtant, Monsieur Fabius a affirmé qu’il était possible d’harmoniser les politiques sociales européennes, d’avoir un SMIC européen, des législations communes, etc., comme si la France allait réussir à imposer aux autres la rigidité de son modèle plutôt que de se réformer. Monsieur Fabius connaissait la réalité, mais il l’a masquée à ses électeurs.

Monsieur Montebourg se pose en digne héritier de cette méthode (est-ce là une énième résurgence du dogme mitterrandien du PS pris sur sa gauche?). Car il faut le dire et le répéter: jamais les autres pays de l’UE ne voudront adopter de barrières protectionnistes telles qu’il les propose: l’Allemagne croît grâce à ses exportations, comme les pays scandinaves, tandis que les Anglais ou les Néerlandais sont viscéralement attachés au libre-échange, qui assure leur fortune depuis des siècles. Les pays latins sont peut-être moins enthousiastes à l’égard de la mondialisation, mais ils savent pertinemment qu’il s’agit d’une évolution irréversible: il suffit de constater que les dirigeants socialistes de ces pays (Zapatero, Prodi il y a quelques années) ont toujours été plus proches du modèle "blairiste" que des socialistes français (ces derniers se gaussent en général quand on évoque Tony Blair, mais ils gagneraient sans doute à tirer les leçons de leur isolement sur la scène socialiste européenne). Bref, là où les Britanniques se placent à un extrême du spectre libre échangiste, la France se trouve elle aussi isolée mais à un autre extrême, protectionniste. Malheureusement, les Français ne semblent pas en avoir conscience ce qui laisse libre cours aux spéculations électoralistes.

Dès lors, et Monsieur Montebourg le sait bien, même s’il refuse de l’avouer, la démondialisation devra se faire à l’échelle nationale, puisqu’elle ne se fera pas à l’échelle européenne. Est-ce faisable, alors que la France est dans le marché unique? La réponse est non, puisque la libre circulation des biens impose qu’une fois rentré dans l’UE (que ce soit à la frontière portugaise ou finlandaise), un produit y circule librement. Pour imposer de nouvelles taxes aux produits chinois, il faudra donc les imposer à la frontière française, et donc sortir du marché commun. Or ce dernier est le socle de l’UE: il faudra donc en sortir également (avec un effet dramatique sur nos exportations et nos importations, réseaux de transports, politique de concurrence, d’innovation, agricole, de développement…), abandonner l’euro (et donc faire le choix de l’inflation et de l’instabilité), et in fine se résoudre à devenir un petit pays en déclin et en repli.

Arnaud Montebourg n’a pas eu le courage d’aller au bout de son raisonnement, et en cela, s’est rendu coupable d’entretenir l’idée d’un socialisme français phare de l’Europe, illusion dans laquelle s’enferme une partie des socialistes français. La France, comme toute démocratie, a besoin d’une opposition crédible et mérite donc mieux que cela. Souhaitons donc que le lauréat de la primaire du PS, Monsieur Hollande, se garde d'emprunter les chemins obscurs proposés par Monsieur Montebourg en matière économique.

 

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